2009, Revue Philosophique
On ne commente plus guère The Open Society and its Enemies (1945), de Karl Popper (1902-1994), (dont la "traduction" française est inutilisable), alors même que bien des idées de cet ouvrage trop polémique, mais très riche, sont souvent "redécouvertes". La critique impitoyable et unilatérale de la politique de Platon et de Hegel que l'on y trouve a fait complétement oublier les thèses positives qu'il contient, sur la justice comme égalité, la démocratie comme régime où l'on peut éliminer les dirigeants par des mécanismes institutionnels non violents, la critique des théories de la souveraineté, "l'utilitarisme négatif", le marché et le droit, la rationalité comme "ouverture à la critique", la thèse de la nécessaire "foi en la raison" (point de départ de la tentative apélienne de "fondement ultime de la raison", en réaction contre cette apparente concession au fidéisme), la critique de toute "philosophie de l'Histoire", la compatibilité du rationalisme et du scepticisme "anti-autoritaire", l'opposition is/ought, la théorie de l'individualisme méthodologie institutionnaliste, etc. On se rendrait compte en lisant plus "froidement" cet "ouvrage de guerre" que sur bien des points, nous sommes tous devenus, faut-il l'espérer, des amis de la Société Ouverte. Le titre de l'ouvrage est à lui seul tellement évocateur que l'on ne compte plus ceux qui en reprennent le balancement. L'ensemble des textes que nous offrent aujourd'hui les éditeurs de ce gros volume, dont il faut louer le travail, n'est à dire vrai précieux que pour ceux qui auront fait l'effort de lire, et non de survoler, The O. S.. Une Introduction est constituée par un texte de 1963 sur les conceptions "optimiste, pessimiste et pragmatiste" de la connaissance scientifique, qui rappellera au lecteur de Popper la magistrale Introduction de Conjectures et Réfutations, "Sur les sources de la connaissance et de l'ignorance".