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Les Soirées de famille

2005, Vst - Vie Sociale Et Traitements

Les Soirées de famille R evenir sur les Soirées de famille qui se tinrent au Monument-National de 1898 à 1901 force à s'interroger sur leur importance dans notre histoire du théâtre. Doit-on croire Jean Béraud qui écrit en 1958: «Mouvement sympathique, à coup sûr, que ces soirées de famille qui portaient bien leur nom, où l'on se plaisait à applaudir des parents, des amis, les amis de ses amis, mais d'aucune signification dans la création d'un théâtre national 1 » ? Trente ans plus tard, Jean-Marc Larrue n'est pas plus tendre qui titre les quatre paragraphes qu'il leur consacre « l'échec nécessaire 2 ». Ou vaut-il mieux suivre Ernest Tremblay qui, racontant leur fondation auquel il participa, s'écrie : « [N]ous venions de poser la pierre angulaire du temple de l'art dramatique, au Canada 3 » ? Aussi le contexte qui a présidé à la fondation de cette troupe doit-il être rappelé. Lorsque l'avocat Elzéar Roy échafaude son projet au commencement de l'année 1898, la population francophone de Montréal est privée de théâtre professionnel de qualité depuis bientôt deux ans. La troupe de l'Opéra français qui s'est maintenue de 1893 à 1896 a cessé brutalement ses activités. Ses difficultés financières sont très probablement liées à l'incapacité de renouveler un répertoire dont il faut changer toutes les semaines. Car le public montréalais de langue française, susceptible de goûter une programmation plus soutenue, est encore très restreint. La mauvaise réputation accolée au monde du spectacle empêche encore une bonne partie de la bourgeoisie canadienne-française de s'y montrer 4 , particulièrement les femmes dont on attend une respectabilité sans faille. Un exemple parmi d'autres ? La mixité est encore très mal vue lorsqu'elle règne dans les rangs amateurs.