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POROT Couperin et ville

Abstract

Paris est pour un riche un païs de Cocagne Sans sortir de la ville, il trouve la campagne : Il peut dans son jardin tout peuplé d'arbres verds, Receler le printemps au milieu des hyvers, Et foulant le parfum de ses plantes fleuries, Aller entretenir ses douces rêveries. Boileau, Satire VI 1 musicale ont plus d'importance que les peintures plus ou moins réalistes qu'elles transcendent et transfigurent : entre une ville réelle et une ville imaginée, quelle est celle que choisit François Couperin ? Au début du XVIII e siècle, le compositeur fait paraître quatre livres de pièces de clavecin qui représentent le témoignage le plus important de son univers musical 2. Ils sont publiés successivement en 1713, 1717, 1722 et 1730 3. Ces dates ne préjugent pas bien sûr de celles de la composition : elle débute sans doute à partir de la fin des années 1680, vingt-cinq ans environ avant la sortie du premier livre 4. Nous sommes donc en présence d'un corpus qui couvre la fin du règne de Louis XIV, la Régence et le début du règne de Louis XV, à l'époque où Paris connaît un « redressement spectaculaire 5 » notamment grâce aux travaux de Louis XIV dans les quartiers du centre et à la poussée de certains quartiers vers l'Ouest, un peu plus tard au cours du XVIII e siècle. François Couperin, quant à lui, a été élevé dans un des vieux quartiers de Paris, celui de la « Ville » qui comprend les Halles et la place de Grève 6. Comme souvent à l'époque pour les musiciens dépendant d'une paroisse, il occupe le « logement des organistes » de Saint-Gervais concédé par le clergé, et ce pendant sa jeunesse 7. Vers 1697, il déménage rue Saint-François puis sous la Régence, il change trois fois d'habitation avant de se fixer dans la rue Neuve des Bons Enfants en 1724 8 , dans un secteur apprécié des musiciens, notamment ceux qui travaillent à l'Académie Royale de Musique toute proche. D'illustres clavecinistes y ont également résidé : Marie-Françoise Certain-l'interprète parisienne la plus prestigieuse au tournant du siècle-, dans la rue du Hasard et Jean Henry d'Anglebert dans la rue Sainte-Anne 9. Couperin a également connu des environnements champêtres comme le village et le château de Saint-Germain-en-Laye où réside la famille royale d'Angleterre exilée, les Stuart. Il a loué en 1710, une maison dans ce village, sans doute pour profiter du calme et du repos et pour être plus près de la cour anglaise pour laquelle il travaille depuis la fin 1692 10. De même