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Juger de la fiction

2018, Poétique n°184

https://doi.org/10.3917/poeti.184.0181

Abstract

Cette contribution entend questionner un double discours sur les enjeux éthiques de la fiction. Il s'agit de mettre en parallèle les discours qui défendent l'idée que les oeuvres seraient capables d'agir sur nos croyances et nos valeurs et ceux qui montrent que nos croyances et nos valeurs sont justement les opérations de cadrage à travers lesquels nous jugeons des fictions. Prenant pour exemple une nouvelle polémique de Sade, on propose ici d'étudier les transactions envisageables entre les "programmes" (éthiques ou empathiques) des oeuvres et leurs réceptions possibles pour alimenter une interrogation : comment conceptualiser les virtualités de nos jugements sur la fiction ?

Key takeaways

  • La situation à juger s'intègre aussi dans une pluralité de perspectives internes à la fiction, notamment les jugements éthiques des personnages eux-mêmes : Franval, Eugénie ou Valmont (camarade libertin de Franval) défendent l'inceste et l'estiment légitime pour des raisons affectives ou philosophiques, alors que Mlle et Mme de Farneille (respectivement mère et grand-mère d'Eugénie) ainsi que Clervil (leur confesseur) dénoncent la liaison au nom des valeurs de la religion ou de la haine qu'ils vouent à Franval.
  • Le jugement du lecteur par rapport à l'expérience donnée à vivre pourra finalement être strictement conditionné par ses propres croyances éthiques.
  • Même si l'on continue d'admettre que l'éthique du narrateur s'oppose à celle de Franval, ses positions affectives ne sont pas toujours claires.
  • Les croyances éthiques du narrateur sont elles-mêmes sujettes à recomposition.
  • Pour aller plus loin encore, on constate même qu'un positionnement libertin du narrateur ne s'accompagnerait pas nécessairement d'un programme empathique favorable à Franval.