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Fausse conscience et femme voilée

2019, Le Devoir

On sait les réactions collectives viscérales que suscite ces jours-ci la simple mention du voile porté par certaines femmes musulmanes. Il est souvent présenté comme une pratique qui leur est imposée. Le démenti des principales intéressées (non, je porte le voile par choix) ne désarçonne pas les critiques, qui rétorquent couramment que les femmes voilées, parce que leur esprit a été colonisé par l'islam, ne sont pas capables d'exercer un libre choix. Par exemple, Lise Payette déclarait en 2008 : « Une femme conditionnée par son milieu depuis sa tendre enfance, élevée avec l'idée qu'il vaut mieux porter le hidjab, peut-elle exercer un choix vraiment libre? » Plus récemment, Caroline Beauchamp écrivait que l'interdiction du voile, au fond, donne aux femmes musulmanes « un choix véritable ». Payette et Beauchamp recourent ainsi à la théorie de la fausse conscience, théorie qui prétend expliquer les actions irrationnelles d'une personne par la contrainte qu'exerce une domination sur sa pensée, ses sentiments et sa volonté.