Le 16 décembre 2015, la Cour Suprême japonaise s'est prononcée sur la constitutionnalité de deux dispositions du droit de la famille dont le bien-fondé est contesté par une partie de la société civile depuis maintenant plus de 20 ans. Si le délai de viduité (Art. 733 du Code Civil) fut jugé inconstitutionnel dans l'état, l'obligation pour les époux de porter le même nom de famille (Art. 750 du Code Civil) fut quant à elle jugée constitutionnelle par la majorité des juges, au grand regret des femmes qui espéraient se voir reconnaître le droit de conserver leur nom de naissance à l'issue du mariage. Ce jugement marque une nouvelle opportunité manquée d'ouverture de l'institution matrimoniale japonaise à davantage de diversité. L'un des grands apports de l'analyse genrée du droit est de mettre en évidence la manière dont une norme de droit à la formulation universaliste, peut se révéler, dans la pratique, exclusive et inégalitaire. L'article 750 du Code Civil japonais est un cas d'école sur ce point : malgré une formulation égalitaire, ses effets sont encore foncièrement genrés avec plus de 95% des couples mariés qui optent pour le nom du mari. Néanmoins, la mise en évidence de ce caractère genré ne garantit pas la victoire dans le cadre d'un procès, les institutions juridiques ayant tendance à se retrancher vers une lecture formelle de l'égalité, comme cela a pu être le cas le 16 décembre. Le présent papier abordera la manière dont les avocats des plaignants ont contesté le caractère constitutionnel de l'article 750 avant de revenir sur les arguments qui leur ont été opposés par la Cour Suprême. Ce faisant, sera mis en évidence la résistance de l'institution matrimoniale japonaise à l'égard de la diversification des formes familiales.