Précisons d'emblée qu'il s'agit d'évoquer ici les rapports entre « peuple » et « populations » dans une perspective essentiellement constitutionnelle, autrement dit à partir des définitions et des implications qui découlent des textes et de la jurisprudence constitutionnelle, alors même que ces deux notions peuvent tout aussi bien faire l'objet d'une approche sociologique, historique, pour ne pas dire idéologique. Bien souvent, d'ailleurs, les malentendus et les controverses tiennent à l'utilisation de ces deux notions, et notamment de celle de peuple, dans des acceptions différentes. Ainsi, si l'on peut, d'un point de vue historique et sociologique évoquer l'existence d'un peuple Corse ou Martiniquais par exemple, définis comme des communautés sociales et culturelles caractérisées par une identité propre, force est de constater leur inexistence au regard du droit constitutionnel positif, alors même que ce dernier reconnaît par ailleurs les populations corses ou martiniquaises. C'est dire que les notions de « peuple » et de « population », dans leur acception juridique, doivent être distinguées, même si la distinction n'apparaît pas toujours évidente. La notion de population est celle qui paraît soulever le moins de difficultés quant à sa définition. Considérée d'un point de vue démographique comme l'ensemble des habitants d'un même territoire, son utilisation, dans le texte constitutionnel, renvoie à deux signification différentes : d'une part la population, au singulier, désigne la base de la représentation nationale (constitutions de 1791, 1793 (article 21), 1848 (article 23), 1852 (article 34), décisions du Conseil constitutionnel relatives au découpage des circonscriptions électorales) ; d'autre part, son utilisation au pluriel vise des populations « locales », comme les populations « intéressées » mentionnées à l'article 53, alinéa 3 de la Constitution de 1958 (également à l'article 27, alinéa 2, de la Constitution du 27 octobre 1946), les populations d'outre-mer de l'article 72-3, alinéa premier de la Constitution de 1958, ou encore les populations de la Nouvelle-Calédonie mentionnées aux articles 76 (populations appelées à se prononcer sur les dispositions de l'accord de Nouméa) et 77 (populations intéressées de la