2007, La Jouissance et le sacré dans l'oeuvre romanesque d'Alice Walker
Ce travail analyse le signe d’identité des sept romans d’Alice Walker, le fil conducteur, qui réside dans la rencontre sur la page de la jouissance et du sacré ; ces deux concepts s’affrontent et s’annulent, s’opposent et se construisent, pour finalement se rejoindre dans un corps-texte riche et poétique. Le sacré patriarcal constitue tout d’abord un héritage, celui de l’esclavage puis de la ségrégation, un legs de la société sudiste qui broie l’identité et interdit la jouissance du sujet. La seule libération possible est alors textuelle, comme en témoigne l’évolution des techniques narratives des œuvres qui s’éloignent d’une vision conventionnelle, chronologique, univoque. Jouir du sens nécessite de lutter contre le sacré, par la revendication politique ou la distance humoristique qui permettent de renverser les statues. Un espace de résistance se met alors en place entre ces deux concepts centraux. La résilience s’instaure notamment par le texte qui, après avoir subi les assauts de l’impératif de jouissance hérité à travers une tradition littéraire, s’affranchit dans la rupture et la perte. L’avènement de la jouissance survient par le retour à un autre ordre sacré, ou un sacré d’un autre ordre, celui de l’érotisme, du mystère et de la sublimation, grâce à la symbiose des deux concepts. La création artistique devient une tentative de conquête de cette jouissance alors même qu’elle s’inscrit dans une tradition littéraire noire américaine. Le monde est recréé grâce au temps mythique des origines, au récit mythique d’une histoire sacrée, à la révélation des mystères de la création avec, enfin, le nirvana, la mort de l’auteur, le sacre de l’écrivain, et le plus-de-jouir du lecteur et de l’auteur par cette écriture de la jouissance. Les outils critiques utilisés sont d’ordre psychanalytique, linguistique et narratologique. This work analyses the symbolic core of Alice Walker’s seven novels, the main thread which stems from the meeting on the page of the jouissance and the sacred: these two concepts stand opposed, then build each other and eventually converge in a rich and poetic textual body. The patriarchal sacred first represents a legacy of slavery and then of segregation, inherited from the Southern society which crushes identity and prevents the subject from reaching jouissance. The only possible liberation then is textual, as the evolution of the narrative technique of the novels proves it since Alice Walker drifts away from a conventional, chronological and univocal vision. To enjoy the meaning implies to fight the sacred through political commitment or humorous distance which enable to topple statues. A space of resistance builds up between these two key concepts. Resilience emerges notably with the text which, after having suffered the blows of the imperative of the jouissance inherited through a literary tradition, frees itself in rupture and loss. The advent of the jouissance comes with the return of another sacred order, or a sacred of another order, that of eroticism, mystery, sublimation, thanks to the symbiosis of the two concepts. Artistic creation, while falling within the frame of an African -American literary tradition, becomes an attempt to conquer this jouissance. The world is re-created via the mythical time of the origins, the mythical story-telling of a sacred history, the revelation of the mysteries of creation and eventually the nirvana, the death of the author, the consecration of the writer and the “plus-de-jouir” (a surplus value) of both writer and reader through this expression of jouissance. This study is based on psychoanalytical, linguistic and narratological tools