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Claude Simon chez les Helvètes

2018, Cahiers Claude Simon

je vais faire comme font (depuis Homère au moins) les auteurs avisés : c'est-à-dire adopter l'ordo artificialis, commencer in medias res. Nous voici donc en novembre 1986. Claude Simon, qui vient d'obtenir le prix Nobel, est à Genève, où il fait l'objet d'un colloque. Deux figures marquantes du département de français, professeurs émérites depuis peu, y prennent la parole, Jean Starobinski et Roger Dragonetti 1. Starobinski, qui médite alors un livre sur « la forme du jour », parle d'Histoire. Avec son élégance et son érudition coutumières, il montre comment Claude Simon investit cette structure porteuse ancienne : en sujet mélancolique, constate le critique, sensible on le sait aux manifestations littéraires de cette humeur. Quant à Roger Dragonetti, décoiffant professeur de littérature médiévale, il empoigne le texte des Géorgiques avec hardiesse, y institue des rapprochements lexicaux propices à la lecture réflexive. Manque à cette journée un autre retraité notable, Jean Rousset. Était-il empêché, je ne sais-mais sa place y était toute désignée. Comme celle de Lucien Dällenbach, bien sûr, son successeur, qui organisa la rencontre. En 1986, l'intérêt pour Claude Simon est loin d'être inédit, dans la cité de Calvin. Et ce n'est pas la première fois que Simon est à Genève : à l'invitation de Dällenbach, il y a déjà donné, à quelques reprises, des conférences. (Ainsi, le 1 er juin 1977, comme l'attestent quelques notes que j'ai retrouvées.) Jean Rousset, puis Lucien Dällenbach, mettent régulièrement son oeuvre au programme ; on ne pouvait alors, si l'on étudiait à Genève, passer à côté de Simon,… 1. Les références bibliographiques complètes des textes évoqués ou cités figurent dans la bibliographie placée en annexe.