Papers by Dominique Martin

Le but de la présente recherche est, d’une part, d’ouvrir une fenêtre d’observation sur un quarti... more Le but de la présente recherche est, d’une part, d’ouvrir une fenêtre d’observation sur un quartier de Paris n’ayant pas fait l’objet d’études poussées, celui de la Place Maubert, et d’autre part, d’analyser le langage policier qui s’y écrit afin d’observer la manière dont le policier catégorise le social et avec quels mots il le fait. Cette recherche historique s’appuie donc principalement sur les archives manuscrites du fonds Y, conservé à la Bibliothèque Nationale de France et qui contiennent les rapports, notes et communications quotidiennes du commissaire Charles Convers Desormeaux. Nous étudions plus spécialement celles produites entre juin et décembre 1764, ainsi qu’entre juin et décembre 1774, à savoir plus de 3000 feuilles en formant in-piano. Il est à noter que cette dernière année a été transcrite dans son intégralité et traitée à travers divers logiciels de gestion de bases de données et de traitement de texte. Nous traitons ainsi d’histoire de la police parisienne au XVIIIe siècle, de la réalité sociale du quartier de la Place Maubert, de la relation qu’entretient la police avec l’écrit et le langage et les changements qu’accuse celle-ci dans les années 1770. Nous nous penchons ensuite sur le vocabulaire observé dans les archives de Charles Convers Desormeaux et émettons l’hypothèse qu’une appropriation du terme légal quidam par la police mène à observer une classification sociale dans les archives, basée sur un jugement moral négatif émis par la police du quartier. Nous avançons finalement qu’en raison de la relation proche entre justiciables et policiers dans leur quartier respectif cette nouvelle utilisation du mot quidam pourrait s’être répandue graduellement dans le langage populaire jusqu’à figurer dans les dictionnaires au XIXe siècle.
Mots-clés : Histoire du langage, Police, Paris, Quidam, Place Maubert.

Lorsqu’Henri Danjou faisait paraître son livre « Place Maubert, dans les bas-fonds de Paris » en ... more Lorsqu’Henri Danjou faisait paraître son livre « Place Maubert, dans les bas-fonds de Paris » en 1929, il décrivait un quartier qui n’en était pas à sa première génération égarée dans la perdition. À travers les histoires personnelles saugrenues se succédant, on peut y voir une situation surannée, une misère qui ne se modifie qu’à peine à travers l’âge. Les séjours au dépôt, l’alcoolisme qui réchauffe, les cabarets où l’on dort moyennant son verre à l’heure ne datent pas de 1929 et le XXe siècle ne les a pas vu naître.
Or, la place Maubert du XVIIIe, sous la plume de nombreux historiens, apparaît sous un jour presque identique. Arlette Farge la qualifie de « théâtre de la violence » et Vincent Milliot, par la carrière qu’y font les commissaires, y voit un quartier populaire difficile à contenir et à réguler. Or, si l’on suit Dominique Kalifa, pour qu’un endroit puisse être qualifié dans l’imaginaire social de « bas-fonds », il doit avant tout être marqué de trois éléments s’entrelaçant étroitement; le crime, la misère et le vice.
Nous comptons donc, par l’analyse d’un des seuls corpus d’archives en émanant directement et n’étant pas produit a posteriori des événements qu’il relate, tenter de réconcilier l’imaginaire lié à la Place Maubert et ce que nous en projettent les réalités quotidiennes. Ainsi, à travers l’usage des archives de police du commissaire Convers Desormeaux pour l’année 1774, nous observerons les liens sociaux et économiques qui sont perceptibles et nous interrogerons notamment sur la relation des habitants entre eux, sur les liens avec les faubourgs environnants, la place de la mendicité, de la consommation d’alcool et de la débauche publique. Finalement, nous comparerons ces données à cette idée de bas-fonds, pour nous demander si elle convient bien à ce quartier particulier.

La police du Paris des Lumières a fait couler sa part d’encre. Déjà au XVIIIe siècle, les souvera... more La police du Paris des Lumières a fait couler sa part d’encre. Déjà au XVIIIe siècle, les souverains étrangers commandent des mémoires à son sujet, laissant aux chercheurs ces documents qui témoignent de l’image que cette police entendait projeter quant à son entreprise de gestion de l’espace urbain parisien. Les traités de Jean Baptiste Charles Lemaire et de Nicolas De La Mare en sont de bons exemples.
On y insiste sur l’importance de préserver l’ordre social et cette fonction d’arbitrage, liée à l’exercice de la police ordinaire, semble devenir un point focal de l’action policière. Si les traités nous les présentent comme magnanimes, des chroniqueurs tels que Louis-Sébastien Mercier nous dépeignent une police intraitable, cruelle et insensible aux malheurs du peuple.
À travers les archives de Convers Desormeaux, commissaire à la Place Maubert, pour l’année 1774, nous nous interrogerons sur ce qu’implique ce maintien de la paix. Nous nous attacherons à voir ce que ces riches informations sur la sociabilité du quartier, issues du quotidien, de la cohabitation et, conséquemment, d’éventuelles confrontations qui en résultent, peuvent nous dire sur l’attitude qu’entretient Desormeaux face à ses justiciables. Sa résolution des conflits est-elle empreinte de sévérité, du désir de réformer par la douceur? Nous observerons également sa gestion du désordre social, Desormeaux étant chargé de la mendicité à cette époque. Ainsi, en suivant les travaux de Rachel Couture et Justine Berlière, nous nous demanderons en somme si, pour cette police se désirant scientifique et raisonnée, le maintien de la paix équivaut à prévenir, guérir ou surprendre le crime.
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Mots-clés : Histoire du langage, Police, Paris, Quidam, Place Maubert.
Or, la place Maubert du XVIIIe, sous la plume de nombreux historiens, apparaît sous un jour presque identique. Arlette Farge la qualifie de « théâtre de la violence » et Vincent Milliot, par la carrière qu’y font les commissaires, y voit un quartier populaire difficile à contenir et à réguler. Or, si l’on suit Dominique Kalifa, pour qu’un endroit puisse être qualifié dans l’imaginaire social de « bas-fonds », il doit avant tout être marqué de trois éléments s’entrelaçant étroitement; le crime, la misère et le vice.
Nous comptons donc, par l’analyse d’un des seuls corpus d’archives en émanant directement et n’étant pas produit a posteriori des événements qu’il relate, tenter de réconcilier l’imaginaire lié à la Place Maubert et ce que nous en projettent les réalités quotidiennes. Ainsi, à travers l’usage des archives de police du commissaire Convers Desormeaux pour l’année 1774, nous observerons les liens sociaux et économiques qui sont perceptibles et nous interrogerons notamment sur la relation des habitants entre eux, sur les liens avec les faubourgs environnants, la place de la mendicité, de la consommation d’alcool et de la débauche publique. Finalement, nous comparerons ces données à cette idée de bas-fonds, pour nous demander si elle convient bien à ce quartier particulier.
On y insiste sur l’importance de préserver l’ordre social et cette fonction d’arbitrage, liée à l’exercice de la police ordinaire, semble devenir un point focal de l’action policière. Si les traités nous les présentent comme magnanimes, des chroniqueurs tels que Louis-Sébastien Mercier nous dépeignent une police intraitable, cruelle et insensible aux malheurs du peuple.
À travers les archives de Convers Desormeaux, commissaire à la Place Maubert, pour l’année 1774, nous nous interrogerons sur ce qu’implique ce maintien de la paix. Nous nous attacherons à voir ce que ces riches informations sur la sociabilité du quartier, issues du quotidien, de la cohabitation et, conséquemment, d’éventuelles confrontations qui en résultent, peuvent nous dire sur l’attitude qu’entretient Desormeaux face à ses justiciables. Sa résolution des conflits est-elle empreinte de sévérité, du désir de réformer par la douceur? Nous observerons également sa gestion du désordre social, Desormeaux étant chargé de la mendicité à cette époque. Ainsi, en suivant les travaux de Rachel Couture et Justine Berlière, nous nous demanderons en somme si, pour cette police se désirant scientifique et raisonnée, le maintien de la paix équivaut à prévenir, guérir ou surprendre le crime.
Mots-clés : Histoire du langage, Police, Paris, Quidam, Place Maubert.
Or, la place Maubert du XVIIIe, sous la plume de nombreux historiens, apparaît sous un jour presque identique. Arlette Farge la qualifie de « théâtre de la violence » et Vincent Milliot, par la carrière qu’y font les commissaires, y voit un quartier populaire difficile à contenir et à réguler. Or, si l’on suit Dominique Kalifa, pour qu’un endroit puisse être qualifié dans l’imaginaire social de « bas-fonds », il doit avant tout être marqué de trois éléments s’entrelaçant étroitement; le crime, la misère et le vice.
Nous comptons donc, par l’analyse d’un des seuls corpus d’archives en émanant directement et n’étant pas produit a posteriori des événements qu’il relate, tenter de réconcilier l’imaginaire lié à la Place Maubert et ce que nous en projettent les réalités quotidiennes. Ainsi, à travers l’usage des archives de police du commissaire Convers Desormeaux pour l’année 1774, nous observerons les liens sociaux et économiques qui sont perceptibles et nous interrogerons notamment sur la relation des habitants entre eux, sur les liens avec les faubourgs environnants, la place de la mendicité, de la consommation d’alcool et de la débauche publique. Finalement, nous comparerons ces données à cette idée de bas-fonds, pour nous demander si elle convient bien à ce quartier particulier.
On y insiste sur l’importance de préserver l’ordre social et cette fonction d’arbitrage, liée à l’exercice de la police ordinaire, semble devenir un point focal de l’action policière. Si les traités nous les présentent comme magnanimes, des chroniqueurs tels que Louis-Sébastien Mercier nous dépeignent une police intraitable, cruelle et insensible aux malheurs du peuple.
À travers les archives de Convers Desormeaux, commissaire à la Place Maubert, pour l’année 1774, nous nous interrogerons sur ce qu’implique ce maintien de la paix. Nous nous attacherons à voir ce que ces riches informations sur la sociabilité du quartier, issues du quotidien, de la cohabitation et, conséquemment, d’éventuelles confrontations qui en résultent, peuvent nous dire sur l’attitude qu’entretient Desormeaux face à ses justiciables. Sa résolution des conflits est-elle empreinte de sévérité, du désir de réformer par la douceur? Nous observerons également sa gestion du désordre social, Desormeaux étant chargé de la mendicité à cette époque. Ainsi, en suivant les travaux de Rachel Couture et Justine Berlière, nous nous demanderons en somme si, pour cette police se désirant scientifique et raisonnée, le maintien de la paix équivaut à prévenir, guérir ou surprendre le crime.