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Chez Cervantes et chez Rabelais, le roman naît de la rencontre entre des points de vue antagonist... more Chez Cervantes et chez Rabelais, le roman naît de la rencontre entre des points de vue antagonistes sur la réalité. Prolongeant cette lignée, certains romanciers contemporains enquêtent sur la situation de sociétés déchirées par des conflits de valeurs. Robert Musil, Carlos Fuentes, Thomas Pynchon, Salman Rushdie et Édouard Glissant donnent à voir des mondes que la montée en puissance du pluralisme libère et désoriente. En imaginant nos conduites possibles face aux crises qu’entraîne l’accélération de la modernité, ils entrent en dialogue avec les philosophies pluralistes, qui s’efforcent de penser les liens nécessaires à l’équilibre des sociétés multiculturelles. Tout en élaborant une poétique pluraliste, fondée sur l’art de manier les multiplicités, cet essai met en lumière la pensée du politique qui structure ces romans. Il montre avec quelle sensibilité aiguë les romanciers incarnent les échecs répétés de la vie en commun, et quelles armes ils nous donnent pour tenter de les dépasser. Servi par une grande clarté d’écriture, il est aussi une invitation réjouissante et neuve à la lecture de ces œuvres fascinantes.

The heterogeneous novel, theorized by Bakhtin, arises in the novels of Cervantes and Rabelais fro... more The heterogeneous novel, theorized by Bakhtin, arises in the novels of Cervantes and Rabelais from the dialogue between antagonistic points of view on reality. The work carried out here follows this stylistic lineage as it unfolds across novels staging the troubles apparent in societies confronted with value conflicts. The Man Without Qualities by Musil, Terra Nostra by Fuentes, Gravity’s Rainbow by Pynchon, The Satanic Verses by Rushdie and Tout-Monde by Glissant allow us a look at social worlds that pluralism’s rise to power liberates and disorients. As yet a seed in Fuentes with the arrival of Spain in the first modernity, pluralism cracks open Austria-Hungary’s unity in Musil. Pynchon shows the confusion pluralism creates in the scientific sphere, whereas Glissant and Rushdie investigate changes in identity tied to globalization. Relieving diversity of the burden of political correctness, these novels imagine possible reactions in the face of the loss of clear markers brought on by the acceleration of modernity. They thereby enter into dialogue with the pluralism of William James and the pragmatists, as well as with the reflections of liberal and communitarian philosophers on the social ties necessary in efforts to balance multicultural societies. Their pluralism proves to be a way of constructing novels and negotiating the tensions their internal heterogeneity produces. The elaboration of a pluralist poetics allows the forces of multiplicity these novelists deploy to be brought to light, along with the principles of connection they turn to when assuring the cohesion of their fictional universe.
Papers by Vincent Message

Quels effets la violence économique produit-elle sur les individus ? Peut-on y résister par des m... more Quels effets la violence économique produit-elle sur les individus ? Peut-on y résister par des moyens qui soient à la hauteur des oppressions subies, mais qui ne disqualifient pas l'action en la faisant participer à une spirale de violence ? Cet article analyse des romans et des films qui représentent le capitalisme industriel ("A Touch of Sin" de Jia Zhangke, "Des châteaux qui brûlent" d'Arno Bertina), et le capitalisme financiarisé ("Cosmopolis" de Don DeLillo, "Margin Call" de J. C. Chandor). Dans ces fictions, il semble que la violence que les sujets incorporent soit condamnée à s'extérioriser de nouveau, sous des formes destructrices ou autodestructrices qui se prêtent à l'esthétisation. L'articulation des violences reproduit les inégalités de classes : là où la violence structurelle, légalisée et naturalisée, opère à travers des intermédiaires, la violence subjective qu'utilisent les dominés est physique, immédiate et aussitôt condamnable. Chez Bertina et DeLillo, la performance et la carnavalisation du monde peuvent être des vecteurs au moins momentanés de la contestation. Chez Jia Zhangke et Chandor prédominent les replis individualistes et les fuites en avant. En explorant quelques moments-clés de ces fictions, l'enjeu est de déterminer selon quels principes la violence économique se reproduit et se métamorphose.

Cet article cherche à ausculter la singularité de notre moment présent : celui d’un monde où la d... more Cet article cherche à ausculter la singularité de notre moment présent : celui d’un monde où la diversité culturelle de nos sociétés s’accroît car les mobilités s’intensifient ; mais aussi d’un monde où d’autres formes de diversité (celle des espèces vivantes, des écosystèmes, celle des langues que nous parlons) risquent d’être détruites irrémédiablement, et largement de notre fait. J’y parle de ce que l’expérience du voyage a de troublant quand on se met à réfléchir à ces questions : en voyageant, on concourt à rapetisser le monde, à en uniformiser un peu plus les codes et les usages ; mais on confirme aussi aux habitants d’un lieu ce qu’il a de précieux, ce en quoi il peut ouvrir grand les fenêtres de notre esprit, ce en quoi il mérite d’être protégé. Aller voir, par exemple, les orang-outans dans les forêts de Sumatra, c’est contribuer au développement de routes qui peuvent mordre sur la jungle, mais aussi éviter qu’elle ne tombe toute entière sous les coups des industriels d’huile de palme. Le voyage est porteur de ces paradoxes, de cette ambivalence qu’il faut assumer : d’un côté facteur d’homogénéisation, il ouvre d’un autre côté la voie de ces métissages culturels qu’Édouard Glissant désigne du nom de créolisations.

Devenirs du roman, vol. 2: Ecriture et matériaux, May 2014
En quoi consistent les matériaux de la littérature ? En des mots, des paroles, des discours, touj... more En quoi consistent les matériaux de la littérature ? En des mots, des paroles, des discours, toujours. Mais de quel ordre ? Certains relèvent d'expériences qui nous sont familières à tous, et permettent de saisir notre expérience d'un monde commun. D'autres au contraire, qui résistent peut-être plus, que l'écrivain doit aller chercher, témoignent du caractère spécialisé de nos existences, en incluant en particulier dans l'espace de la représentation littéraire les sphères professionnelles, les discours et les mots auxquels donne naissance chaque métier. Cet article s'interroge sur les obstacles que la littérature rencontre quand elle cherche à s'emparer de ces discours professionnels et de ces langages spécialisés. Comment l'écrivain les recueille-t-il ? Quelles résistances spécifiques opposent-ils ? Faut-il les transformer pour les mettre en littérature ou les laisser tels quels ?

Dans les disciplines littéraires, le rapport qu’on entretient à la spécialisation ne devrait pas ... more Dans les disciplines littéraires, le rapport qu’on entretient à la spécialisation ne devrait pas être le produit de contraintes institutionnelles subies. Faire de la spécialisation un passage obligé pour tout lecteur professionnel, et la seule garantie de son sérieux, tient en réalité du contre-sens, puisque la littérature est précisément ce discours qui maintient une proximité avec la langue courante et propose une ressaisie non-spécialisée des problèmes de notre monde. La résistance à la spécialisation est à cet égard souvent réclamée par nos objets de recherche eux-mêmes. Mais c’est aussi une réflexion sur l’état de la critique qui la rend nécessaire. Alors que la lecture littéraire occupe une place moins importante qu’avant dans la culture générale, la critique journalistique opère sous un jeu de contraintes qui la pousse du côté d’une superficialité forcée, tandis que la critique universitaire pâtit, elle, de ce qui apparaît souvent comme une sophistication forcée. Ces constats incitent à créer les conditions d'une montée en puissance de la troisième critique. N’étant obligée de se vouer ni à l’actualité ni à la construction du canon, cette troisième critique se caractérise par un certain rapport d’attention à ses destinataires : parce qu’elle se met en état de s’adresser à un public de lecteurs non-professionnels, elle ne présuppose pas la connaissance des œuvres, mais la construit et la permet. Donner une nouvelle impulsion aux études littéraires demande de s’interroger collectivement sur les raisons pour lesquelles le système universitaire ne reconnaît pas à cette forme de critique la légitimité qu’elle mérite, et de réfléchir du même coup à une réforme de nos usages.

Il faut relativiser les droits de propriété de la littérature sur la fiction narrative : la tradi... more Il faut relativiser les droits de propriété de la littérature sur la fiction narrative : la tradition orale, les industries culturelles l’ont concurrencée dans ce domaine bien avant que les acteurs du monde économique et politique inspirés par les principes du storytelling management ne s’y attellent à leur tour. Savoir raconter et se raconter est une compétence primordiale, en particulier quand on aspire à changer de place au sein de nos sociétés de carrières. En s’appuyant entre autres sur les romans de Tom Wolfe et d’Éric Reinhardt, il s’agit de voir quels types de récits de soi le capitalisme narratif nous incite à produire, pour nous-mêmes ou pour les autres, et de quelles manières la littérature met en scène la fabrication et la circulation de ces récits. À ceux qui n’arrivent plus à se raconter, et que cette perte de la compétence narrative pousse vers la chute, s’opposent des narrateurs compétents, mais dont les usages du récit varient de l’opportunisme à l’opposition radicale, en passant par l’honnêteté pragmatique et le choix d’une forme de piraterie.

Revue critique de fixxion française contemporaine, Jun 15, 2013
Dans cet article, je m’interroge pour savoir ce que veut dire écrire une littérature démocratique... more Dans cet article, je m’interroge pour savoir ce que veut dire écrire une littérature démocratique, dans le domaine de la fiction romanesque. Une première approche consiste à saisir la démocratie en tant que régime et forme de gouvernement. Les fictions qui s’y emploient sont relativement rares, d’une part parce que la démocratie est déjà un thème privilégié du débat public et des sciences humaines, et d’autre part car les écrivains contemporains les plus professionnalisés sont rarement ceux qui connaissent de l’intérieur le monde politique. Lorsque des textes littéraires représentent la démocratie, néanmoins, c’est pour pointer l’écart entre ce qu’elle est et ce qu’elle devrait être. Une deuxième approche consiste pour les romanciers à constituer leur œuvre en un espace démocratique : ils peuvent faire de la fiction une expérience de pensée qui prouve que rien ne s’oppose en droit à l’égalité (comme le montre Rancière), et redistribuer de façon plus égalitaire la parole et l’attention en mettant au premier plan les sujets marginalisés. Une troisième approche enfin consiste à questionner la circulation de la littérature dans l’espace public. Le Clézio, lisant Dagerman, insiste sur le fait que même la littérature qui voudrait se ranger du côté des plus faibles est avant tout le loisir culturel des classes cultivées. S’ouvrir au plus grand nombre est pour la littérature une exigence intenable : passée un certain point, la recherche de lisibilité se fait toujours au détriment de la singularité et de la justesse esthétique. Mais l’esprit démocratique implique en revanche de se débarrasser de tout ce qui relève de la préciosité ou de stratégies de distinction. À condition de négocier à chaque instant un équilibre entre justesse esthétique et lisibilité, la littérature peut accélérer des émancipations individuelles et faire entendre à chaque sujet, selon les mots de Kafka : « Toi aussi, tu as des armes. »

Actes à paraître en 2013 aux éditions Classiques Garnier., 2013
Chez des postmodernes comme Pynchon et Danielewski, l’interprétation investit en force la fiction... more Chez des postmodernes comme Pynchon et Danielewski, l’interprétation investit en force la fiction et s’y diffuse jusqu’à ce que toutes les actions mises en scène aient leur doublure herméneutique. Le pluralisme herméneutique de ces oeuvres repose sur la tension entre deux modes de manifestation des signes. Dans les « récits à baleines blanches », l’activité herméneutique s’attache à un grand signe, un objet absolu où le bouillonnement des significations atteint son maximum d’intensité : les V2 de Pynchon prennent à cet égard le relais de Moby Dick. Dans les « récits à brouillards », les personnages traversent une atmosphère saturée de signes, qui attirent l’attention mais ne la retiennent pas. Chez Pynchon et Danielewski, l’interprétation se comporte comme une force anti-romanesque qui contrarie la progression du récit. Si elle est étroitement liée à la perception d’un danger qu’elle peut aider à conjurer, il est fréquent qu’elle l’aggrave en détournant les protagonistes des impératifs de l’action. Elle s’avère à la fois un mode jouissif d’appréhension du réel et une tâche mortifère dans ce qu’elle a d’inconclusif et d’infini.

Amaltea, Revista de mitocrítica, 2009
Cet article se propose d’analyser les rapports entre le motif du labyrinthe et le thème de la sol... more Cet article se propose d’analyser les rapports entre le motif du labyrinthe et le thème de la solitude à partir de quatre oeuvres : "La Demeure d’Astérion" de Borges, "Le Terrier" de Kafka, "La maison des feuilles" de Danielewski et le film "Shining" de Kubrick. Le même scénario s’y répète : isolé dans un labyrinthe, un personnage sombre dans la folie, puis meurt. Pourquoi les
fictions labyrinthiques font-elles si souvent appel à ce schéma narratif ? La démonstration passe d’abord par un retour au mythe : la solitude y est la condition du Minotaure, personnage que la modernité a réhabilité. Dans la littérature du XXe, les labyrinthes sont essentiellement d’ordre mental : ils représentent moins un monde extérieur hostile que la complexité intérieure du sujet. En dressant un portrait des personnages qui succombent, on verra que les fictions labyrinthiques s’emploient à démontrer ex negativo la nature dialogique de l’identité subjective. Les victimes du labyrinthe sont des individus qui poussent le refus de l’autre jusqu’au solipsisme et voudraient maîtriser un environnement dont la complexité les déborde. Derrière ces personnages qui représentent autant d’exemples à ne pas suivre, on peut entrevoir un portrait en creux du lecteur idéal des fictions labyrinthiques.

Publié dans Danièle Perrot-Corpet et Lise Gauvin (dir.), "La Nation nommée Roman face aux histoires nationales", Classiques Garnier, p. 369-381., 2011
Fuentes et Glissant affirment que le roman, devenu un phénomène mondial, se constitue en espace d... more Fuentes et Glissant affirment que le roman, devenu un phénomène mondial, se constitue en espace démocratique où toutes les voix sont susceptibles de prendre la parole. Ce constat se fonde sur leur trajectoire personnelle, qui leur a permis d’être reconnus par les centres de consécration traditionnels. Mais les deux auteurs ne vont-ils pas trop vite en besogne en généralisant cette expérience ? L’article montre que leur discours sur la littérature mondiale s’articule autour d’une défense du pluralisme, qui devient chez eux un des enjeux éthiques majeurs de l’écriture romanesque. Il étudie ensuite les conditions de recevabilité de leur discours. La littérature mondiale qu’ils appellent de leurs voeux doit s’écrire en conscience du monde, mais pas nécessairement en prenant le monde pour objet.
Si elle est un nouveau mode de contextualisation de l’écriture romanesque, la littérature mondiale ne saurait tourner à l’impératif thématique, contrairement à ce que laisse entendre une expression comme « littérature-monde » quand monde y prend le sens de migrations et de métissages. D’autre part, la mondialisation que les auteurs évoquent ne relève pas de l’état de fait, mais du devrait être. En faisant passer pour une réalité et une dénotation ce qui est chez eux de l’ordre du désir et de la prescription, Glissant et Fuentes marquent leur refus de soumettre la littérature au discours politico-économique qui domine les analyses de la mondialisation.

Litterature, 2009
En s’appuyant sur les textes où Borges rend compte de ses lectures de Joyce, cet article cherche ... more En s’appuyant sur les textes où Borges rend compte de ses lectures de Joyce, cet article cherche à voir comment les poétiques des deux écrivains s’éclairent mutuellement. Il se concentre en particulier sur un reproche que Borges adresse à Joyce à propos de Finnegans Wake : « Dans ce vaste ouvrage, l’efficacité reste une exception. » À partir de cette remarque, il s’agit d’analyser l’usage qui peut être fait de la notion d’efficacité dans la critique d’œuvres romanesques. La démonstration passe entre autres par une lecture de L’Histoire de deux rois et de deux labyrinthes de Borges : ce conte oriental, repris dans L’Aleph, est une réaction masquée à la lecture de Finnegans Wake et constitue une véritable parabole opposant Borges et Joyce, soit deux pratiques de la littérature. Si l’idée d’efficacité s’avère un concept utile à la réception d’un texte aussi excessif que Finnegans Wake, elle est en effet étrangère à l’esthétique de Joyce : l’écrivain organise son roman selon une métaphore cosmologique, comme un livre-univers, tandis que l’efficacité ressortit à une métaphore d’organisation économique des œuvres littéraires, dont Borges est beaucoup plus proche. L’idée d’efficacité apparaît ainsi comme un des produits de la tradition rationaliste occidentale contre laquelle Joyce n’a de cesse de lutter.
Borges recounts his readings of Joyce in a number of texts, which show how these writers’ poetics shed light on each other. In particular, Borges has a specific criticism to make regarding Joyce’s "Finnegan’s Wake": “In this vast work, efficiency remains an exception.” This comment enables the analysis of the use that the notion of efficiency can be put to in the critique of novelistic works, which uses, among others, a reading of Borges’ "A Story of Two Kings and Their Two Labyrinths". This oriental tale, collected in The Aleph and other stories, is a covert reaction to Borges’ reading of Finnegan’s Wake and constitutes a parable opposing Borges and Joyce, or two ways of doing literature. But if the idea of efficiency can prove useful in receiving a text as excessive as Finnegan’s Wake, it is on the other hand completely foreign to Joyce’s aesthetics: he organises his universe according to a cosmological metaphor, that of the book-universe, whereas efficiency belongs to the metaphoric realm of the economic organisation of works of literature, which Borges is much closer to. Thus the idea of efficiency appears as one of the products of the rational Western tradition against which Joyce never ceased to struggle.
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"Ce qui déchire c’est d’être devant la glace. Et de se regarder. Et d’assumer que le visage là, e... more "Ce qui déchire c’est d’être devant la glace. Et de se regarder. Et d’assumer que le visage là, en face, c’est le visage qu’on porte dans la rue. C’est dur de se dire ça, oui, on voudrait en changer, mais se dire ça ne sert à rien, non, il ne va pas changer, ça ne va pas changer, et si ça finit par changer c’est juste que ce sera pire, alors il faut juste faire les gestes pour le rendre présentable. Laver, raser, nouer la cravate. Et le lendemain laver, raser, nouer la cravate. Et le lende- main, encore et du pareil au même."
Nouvelle publiée dans le numéro de la revue "Esprit" consacré aux représentations du chômage, en novembre 2014.
Les musées de notre pays ne sont pas faits de briques ou de pierres, de métal et de verre : ils a... more Les musées de notre pays ne sont pas faits de briques ou de pierres, de métal et de verre : ils apparaissent et disparaissent autour de nous, tout le temps. On n’y entre pas pour comprendre tout de suite. On veut rester hanté par ce qu’on a vu, on désire que le sens échappe. Lâcher prise carrément, pour ne retrouver des prises qu’ensuite, ou peut-être pas du tout. Du moins, c’était ainsi jusqu’à ce que se manifeste le parti de celles et de ceux qui ne mettent jamais les pieds dans les musées de notre pays. – Entre Charybde et Scylla, élitisme et populisme, une virée sur les territoires imaginaires de l'art contemporain
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fictions labyrinthiques font-elles si souvent appel à ce schéma narratif ? La démonstration passe d’abord par un retour au mythe : la solitude y est la condition du Minotaure, personnage que la modernité a réhabilité. Dans la littérature du XXe, les labyrinthes sont essentiellement d’ordre mental : ils représentent moins un monde extérieur hostile que la complexité intérieure du sujet. En dressant un portrait des personnages qui succombent, on verra que les fictions labyrinthiques s’emploient à démontrer ex negativo la nature dialogique de l’identité subjective. Les victimes du labyrinthe sont des individus qui poussent le refus de l’autre jusqu’au solipsisme et voudraient maîtriser un environnement dont la complexité les déborde. Derrière ces personnages qui représentent autant d’exemples à ne pas suivre, on peut entrevoir un portrait en creux du lecteur idéal des fictions labyrinthiques.
Si elle est un nouveau mode de contextualisation de l’écriture romanesque, la littérature mondiale ne saurait tourner à l’impératif thématique, contrairement à ce que laisse entendre une expression comme « littérature-monde » quand monde y prend le sens de migrations et de métissages. D’autre part, la mondialisation que les auteurs évoquent ne relève pas de l’état de fait, mais du devrait être. En faisant passer pour une réalité et une dénotation ce qui est chez eux de l’ordre du désir et de la prescription, Glissant et Fuentes marquent leur refus de soumettre la littérature au discours politico-économique qui domine les analyses de la mondialisation.
Borges recounts his readings of Joyce in a number of texts, which show how these writers’ poetics shed light on each other. In particular, Borges has a specific criticism to make regarding Joyce’s "Finnegan’s Wake": “In this vast work, efficiency remains an exception.” This comment enables the analysis of the use that the notion of efficiency can be put to in the critique of novelistic works, which uses, among others, a reading of Borges’ "A Story of Two Kings and Their Two Labyrinths". This oriental tale, collected in The Aleph and other stories, is a covert reaction to Borges’ reading of Finnegan’s Wake and constitutes a parable opposing Borges and Joyce, or two ways of doing literature. But if the idea of efficiency can prove useful in receiving a text as excessive as Finnegan’s Wake, it is on the other hand completely foreign to Joyce’s aesthetics: he organises his universe according to a cosmological metaphor, that of the book-universe, whereas efficiency belongs to the metaphoric realm of the economic organisation of works of literature, which Borges is much closer to. Thus the idea of efficiency appears as one of the products of the rational Western tradition against which Joyce never ceased to struggle.
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Nouvelle publiée dans le numéro de la revue "Esprit" consacré aux représentations du chômage, en novembre 2014.
fictions labyrinthiques font-elles si souvent appel à ce schéma narratif ? La démonstration passe d’abord par un retour au mythe : la solitude y est la condition du Minotaure, personnage que la modernité a réhabilité. Dans la littérature du XXe, les labyrinthes sont essentiellement d’ordre mental : ils représentent moins un monde extérieur hostile que la complexité intérieure du sujet. En dressant un portrait des personnages qui succombent, on verra que les fictions labyrinthiques s’emploient à démontrer ex negativo la nature dialogique de l’identité subjective. Les victimes du labyrinthe sont des individus qui poussent le refus de l’autre jusqu’au solipsisme et voudraient maîtriser un environnement dont la complexité les déborde. Derrière ces personnages qui représentent autant d’exemples à ne pas suivre, on peut entrevoir un portrait en creux du lecteur idéal des fictions labyrinthiques.
Si elle est un nouveau mode de contextualisation de l’écriture romanesque, la littérature mondiale ne saurait tourner à l’impératif thématique, contrairement à ce que laisse entendre une expression comme « littérature-monde » quand monde y prend le sens de migrations et de métissages. D’autre part, la mondialisation que les auteurs évoquent ne relève pas de l’état de fait, mais du devrait être. En faisant passer pour une réalité et une dénotation ce qui est chez eux de l’ordre du désir et de la prescription, Glissant et Fuentes marquent leur refus de soumettre la littérature au discours politico-économique qui domine les analyses de la mondialisation.
Borges recounts his readings of Joyce in a number of texts, which show how these writers’ poetics shed light on each other. In particular, Borges has a specific criticism to make regarding Joyce’s "Finnegan’s Wake": “In this vast work, efficiency remains an exception.” This comment enables the analysis of the use that the notion of efficiency can be put to in the critique of novelistic works, which uses, among others, a reading of Borges’ "A Story of Two Kings and Their Two Labyrinths". This oriental tale, collected in The Aleph and other stories, is a covert reaction to Borges’ reading of Finnegan’s Wake and constitutes a parable opposing Borges and Joyce, or two ways of doing literature. But if the idea of efficiency can prove useful in receiving a text as excessive as Finnegan’s Wake, it is on the other hand completely foreign to Joyce’s aesthetics: he organises his universe according to a cosmological metaphor, that of the book-universe, whereas efficiency belongs to the metaphoric realm of the economic organisation of works of literature, which Borges is much closer to. Thus the idea of efficiency appears as one of the products of the rational Western tradition against which Joyce never ceased to struggle.
Nouvelle publiée dans le numéro de la revue "Esprit" consacré aux représentations du chômage, en novembre 2014.