Papers by Julien CUEILLE

La transmedialité fictionnelle est fréquemment interprétée, dans le champ des cultural studies, e... more La transmedialité fictionnelle est fréquemment interprétée, dans le champ des cultural studies, en termes d’empowerment communautaire ou de fan culture. Une enquête de plusieurs mois menée auprès de 61 adolescents de 17 à 24 ans, portant sur leurs préférences en termes de fictions, permet de nuancer ces analyses.
Les déclarations d’appartenance communautaire restent plus que marginales dans l’échantillon. Aucun-e des jeunes interrogé-e-s ne se réfère à un groupe d’appartenance, ni à une passion exclusive pour une œuvre ou un-e auteur-e. Les jugements et préférences formulés dans le cadre de l’enquête ne se réfèrent presque jamais, sauf exception, à une dimension collaborative (si ce n’est les chats lors des jeux en ligne).
Nous nous proposons donc, dans la perspective « 1. Créativité collaborative : réalité ou mythe ? » de questionner certaines lectures sociopolitiques des phénomènes transmedia. Si politique il y a, il s’agit d’une redéfinition profonde de ce mot « politique », qui ne saurait se réduire à ses aspects communicationnels, ni représentationnels, encore moins « identitaires ».
Conspiracy theories have become in a few years a major problem: we have growing testimonies in th... more Conspiracy theories have become in a few years a major problem: we have growing testimonies in the education system. The public authorities have seized it, sociology as well, as well as cognitive psychology. But is it not, almost always, a surface approach, which focuses on the symptom to remove it, at the risk of entering the game of conspiracy speech? What about the lighting of psychoanalysis? The concept of "narcissistic fault", that of "projective identification" and "hold" allows to illuminate the group mechanisms at work in conspiracy. Is not this a defense against certain changes in the social bond, especially management? How to answer it?
The current popularity of "dystopian" themes questions: is not catastrophism, first of all, linke... more The current popularity of "dystopian" themes questions: is not catastrophism, first of all, linked to psychic mutations of the contemporary individual? The figure of the violent teenager, who is at the heart of the apocalyptic imagination, is a sign towards nihilism, generalized adolescence and the "borderline" personality that characterizes postmodern societies, where subjects are in search of a ritualization of oneself. Agamben's essay on "the time that remains" allows us to better grasp the time of uncertainty that is ours, in its possibly fertile ambivalence.

The invention of the concept of bio-power by Foucault opens a space for thinking about the contem... more The invention of the concept of bio-power by Foucault opens a space for thinking about the contemporary articulation of biology, diffuse forms of power or control, and the construction of subjectivities. The work of the bio-artist, far from being merely a denunciation of the societies of control or an utopia of an "augmented man", reveals the ambivalence of biotechnologies, in the mode of "pharmakon" (Stiegler): both "remedy" and "poison". Contradictory, biomachines allow both an increase in the power to act and plasticity, but also, simultaneously, a recolonization of lives even by the normativity of performance and growth. Is it then a will to power and a wish to improve living conditions, in the wake of the ideologies of progress, or rather a desire to finish, the "tiredness of being oneself " ? Résumé : L'invention du concept de bio-pouvoir par Foucault ouvre un espace pour penser l'articulation contemporaine du biologique, des formes diffuses de pouvoir ou
Thesis Chapters by Julien CUEILLE

Le concept lyotardien de « postmodernité » désigne la crise actuelle, à savoir une crise des « mé... more Le concept lyotardien de « postmodernité » désigne la crise actuelle, à savoir une crise des « méta-récits » organisateurs de la modernité, et de l’ordre social, épistémique et discursif qui en découle. Face à la tentative hégémonique actuelle de la biomédecine et du cognitivisme, qui proposent un nouveau mythe scientifique, celui du transhumanisme, et font le jeu d’un « bio-pouvoir » accru, une démarche alternative consisterait à faire converger les lectures « déconstructrices » qui, de la psychanalyse à la philosophie en passant par une certaine anthropologie, font droit à une approche en termes de « pharmakon », c’est-à-dire d’ambivalence du poison et du remède, entre Eros et Thanatos.
La recherche de leurs propres limites est la condition contemporaine des « individus incertains », éternels adolescents, sommés d’être autonomes. On retrouve là la « nouvelle économie psychique » commune : recherche, d’un côté, de performance, d’omnipotence sinon de surhumanité, à l’autre pôle masochisme profond en lien avec une atteinte majeure du narcissisme, et tentatives archaïques de régénération par le sacrifice, font signe vers une figure clinique nouvelle, celle de l’ « état-limite » qui connaît de multiples avatars et résiste aux classifications.
Nombre d’essais sur le « malaise » entremêlent clinique individuelle et spéculations sur la culture, à partir du concept-clé de « désymbolisation ». La carence de Loi et de Père symbolique semble toutefois une explication insuffisante, tout comme la lecture inverse qui pousse à la fuite en avant libertaire. Notre lecture de Lacan refuse de s’inscrire dans ce dualisme Anciens/Modernes, et met l’accent sur la catégorie d’Idéal du Moi et de « trait unaire » qui suggère un nouage du symbolique avec l’imaginaire, loin de les opposer ; celui-ci joue un rôle essentiel, en permettant au symbolique de s’inscrire. La symbolisation est donc un processus plus qu’un état, dans lequel le sujet se trouve confronté, dans l’ambivalence, à la question de ses limites. Il doit convertir le Moi idéal en Idéal du Moi.
C’est ce à quoi s’emploient les mythes, qui étayent, tels des totems médiateurs, le travail de subjectivation, en engageant les sujets dans un processus identificatoire et « transfictionnel » qui produit des effets créatifs. A notre époque de désenchantement du monde, les mythes disponibles ne sont que de quasi-mythes « évasifs », sur fond de malaise et de mort de Dieu. Mais la littérature populaire, notamment celle qui s’adresse aux adolescents, comme certains récits de vampires, propose des « romans narcissiques », où l’Œdipe passe désormais au second plan. Elle revisite le personnage d’Hamlet.
Paradoxalement, les figures des mystiques, adeptes des expériences-limites et imprégnés d’ambivalence, proches de Lacan par leur théologie « négative » de la kénose et leur parole « apophatique », qui cultive la perte, retrouvent également une actualité, ainsi que la figure de l’apôtre Paul, lue par Agamben. Sa christologie du Dieu faible, abaissé, soumis au manque, résonne comme une déconstruction. Elle ouvre à un « temps de la fin », « temps qui reste », qui suspend les identités, désamorce les pouvoirs et rend possible, peut-être, une « promesse » et une « foi » au sens de Derrida, dans une logique ambivalente du sacré où l’idéal voisine avec l’abject.
Dès lors, la cure ne devrait-elle pas, en renonçant à une approche trop nosographique et trop centrée sur la castration symbolique, s’attacher à retrouver la trace féconde et vivifiante du trait unaire, c’est-à-dire laisser une place à l’imaginaire ? Ainsi l’analyse jouerait-elle le rôle d’une sorte de « chambre claire » : en laissant affleurer les « mythes » (ou quasi-mythes), dont celui de Persée vaut comme paradigme du combat que tout analysant a à mener. Il s’agit d’ouvrir l’espace du pharmakon, puisque l’ambivalence de l’Idéal est inscrite comme un risque impossible à évacuer. Mais c’est peut-être au prix de ce risque (qui est aussi un risque partagé, jusqu’à un certain point, par l’analyste) , celui de la chute, du « skandalon », que l’on peut espérer que le sujet se déprenne du Moi idéal et de ses pièges pour opérer un autre nouage, jamais prévisible ni assuré d’avance, et toujours au voisinage du « trou » : une nomination, un sinthome.
Conference Presentations by Julien CUEILLE
Un regard psychanalytique et anthropologique à partir de Michel de Certeau et Jean-Daniel Causse ... more Un regard psychanalytique et anthropologique à partir de Michel de Certeau et Jean-Daniel Causse Hypothèses L' « errance » et l'« excès », voire le goût pour l'apocalypse, et surtout la « quête » individuelle, sont caractéristiques des sujets contemporains . Cet engouement pour un « bricolage » spirituel personnel, toujours à la frontière entre « psy » et « spi », n'est pas sans rappeler, mutatis mutandis, certaines pratiques mystiques anciennes. Contrairement aux traditions religieuses enracinées dans les institutions, il s'agirait alors de démarches marginales, « à la limite », et centrées sur soi un effacement des frontières entre « psy » et « spi » Un chemin de purification: la chair est niée au profit d'un corps transfiguré par le sublime des machines
Insistance sur: le narcissisme (Green), la dépressivité, (voire l'oscillation cyclothymique), la ... more Insistance sur: le narcissisme (Green), la dépressivité, (voire l'oscillation cyclothymique), la « psychose ordinaire » (Miller), la « perversion ordinaire » (Lebrun), les addictions, la somatisation, la mise en acte, la notion d'« états-limites »…

La génération Y, et maintenant Z: Vues comme plus dans l'immédiateté, la mobilité, le ludique, la... more La génération Y, et maintenant Z: Vues comme plus dans l'immédiateté, la mobilité, le ludique, la dérision voire la transgression, le risque, l'excès, le narcissisme, l'absence de repères fixes (Dagnaud 2013, Chavassieux 2017) Mais les parents aussi ont changé: parents « hélicoptères », plus proches et aimants, attentifs aux demandes, mais aussi immatures… et dépendants de leurs propres enfants! N'empêchent-ils pas leurs enfants de grandir et de se séparer? … Paradoxalement, la famille reste la valeur ultime pour les générations Y, qui la plébiscitent (Dagnaud 2013; enquête IPSOS 2010; voir le film Tanguy) De la famille « patrocentrée » à la famille centrée sur l'enfant? Comment est-on passé d'un « familial » volontiers autoritaire, celui du début du siècle dernier, arrimé à la répression exercée par le père, à un univers plus complexe, sans doute plus maternant, « cocoonant », où l'enfant apparaît parfois comme un tyran ? II La psychanalyse: entre familial et familier
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Les déclarations d’appartenance communautaire restent plus que marginales dans l’échantillon. Aucun-e des jeunes interrogé-e-s ne se réfère à un groupe d’appartenance, ni à une passion exclusive pour une œuvre ou un-e auteur-e. Les jugements et préférences formulés dans le cadre de l’enquête ne se réfèrent presque jamais, sauf exception, à une dimension collaborative (si ce n’est les chats lors des jeux en ligne).
Nous nous proposons donc, dans la perspective « 1. Créativité collaborative : réalité ou mythe ? » de questionner certaines lectures sociopolitiques des phénomènes transmedia. Si politique il y a, il s’agit d’une redéfinition profonde de ce mot « politique », qui ne saurait se réduire à ses aspects communicationnels, ni représentationnels, encore moins « identitaires ».
Thesis Chapters by Julien CUEILLE
La recherche de leurs propres limites est la condition contemporaine des « individus incertains », éternels adolescents, sommés d’être autonomes. On retrouve là la « nouvelle économie psychique » commune : recherche, d’un côté, de performance, d’omnipotence sinon de surhumanité, à l’autre pôle masochisme profond en lien avec une atteinte majeure du narcissisme, et tentatives archaïques de régénération par le sacrifice, font signe vers une figure clinique nouvelle, celle de l’ « état-limite » qui connaît de multiples avatars et résiste aux classifications.
Nombre d’essais sur le « malaise » entremêlent clinique individuelle et spéculations sur la culture, à partir du concept-clé de « désymbolisation ». La carence de Loi et de Père symbolique semble toutefois une explication insuffisante, tout comme la lecture inverse qui pousse à la fuite en avant libertaire. Notre lecture de Lacan refuse de s’inscrire dans ce dualisme Anciens/Modernes, et met l’accent sur la catégorie d’Idéal du Moi et de « trait unaire » qui suggère un nouage du symbolique avec l’imaginaire, loin de les opposer ; celui-ci joue un rôle essentiel, en permettant au symbolique de s’inscrire. La symbolisation est donc un processus plus qu’un état, dans lequel le sujet se trouve confronté, dans l’ambivalence, à la question de ses limites. Il doit convertir le Moi idéal en Idéal du Moi.
C’est ce à quoi s’emploient les mythes, qui étayent, tels des totems médiateurs, le travail de subjectivation, en engageant les sujets dans un processus identificatoire et « transfictionnel » qui produit des effets créatifs. A notre époque de désenchantement du monde, les mythes disponibles ne sont que de quasi-mythes « évasifs », sur fond de malaise et de mort de Dieu. Mais la littérature populaire, notamment celle qui s’adresse aux adolescents, comme certains récits de vampires, propose des « romans narcissiques », où l’Œdipe passe désormais au second plan. Elle revisite le personnage d’Hamlet.
Paradoxalement, les figures des mystiques, adeptes des expériences-limites et imprégnés d’ambivalence, proches de Lacan par leur théologie « négative » de la kénose et leur parole « apophatique », qui cultive la perte, retrouvent également une actualité, ainsi que la figure de l’apôtre Paul, lue par Agamben. Sa christologie du Dieu faible, abaissé, soumis au manque, résonne comme une déconstruction. Elle ouvre à un « temps de la fin », « temps qui reste », qui suspend les identités, désamorce les pouvoirs et rend possible, peut-être, une « promesse » et une « foi » au sens de Derrida, dans une logique ambivalente du sacré où l’idéal voisine avec l’abject.
Dès lors, la cure ne devrait-elle pas, en renonçant à une approche trop nosographique et trop centrée sur la castration symbolique, s’attacher à retrouver la trace féconde et vivifiante du trait unaire, c’est-à-dire laisser une place à l’imaginaire ? Ainsi l’analyse jouerait-elle le rôle d’une sorte de « chambre claire » : en laissant affleurer les « mythes » (ou quasi-mythes), dont celui de Persée vaut comme paradigme du combat que tout analysant a à mener. Il s’agit d’ouvrir l’espace du pharmakon, puisque l’ambivalence de l’Idéal est inscrite comme un risque impossible à évacuer. Mais c’est peut-être au prix de ce risque (qui est aussi un risque partagé, jusqu’à un certain point, par l’analyste) , celui de la chute, du « skandalon », que l’on peut espérer que le sujet se déprenne du Moi idéal et de ses pièges pour opérer un autre nouage, jamais prévisible ni assuré d’avance, et toujours au voisinage du « trou » : une nomination, un sinthome.
Conference Presentations by Julien CUEILLE
Les déclarations d’appartenance communautaire restent plus que marginales dans l’échantillon. Aucun-e des jeunes interrogé-e-s ne se réfère à un groupe d’appartenance, ni à une passion exclusive pour une œuvre ou un-e auteur-e. Les jugements et préférences formulés dans le cadre de l’enquête ne se réfèrent presque jamais, sauf exception, à une dimension collaborative (si ce n’est les chats lors des jeux en ligne).
Nous nous proposons donc, dans la perspective « 1. Créativité collaborative : réalité ou mythe ? » de questionner certaines lectures sociopolitiques des phénomènes transmedia. Si politique il y a, il s’agit d’une redéfinition profonde de ce mot « politique », qui ne saurait se réduire à ses aspects communicationnels, ni représentationnels, encore moins « identitaires ».
La recherche de leurs propres limites est la condition contemporaine des « individus incertains », éternels adolescents, sommés d’être autonomes. On retrouve là la « nouvelle économie psychique » commune : recherche, d’un côté, de performance, d’omnipotence sinon de surhumanité, à l’autre pôle masochisme profond en lien avec une atteinte majeure du narcissisme, et tentatives archaïques de régénération par le sacrifice, font signe vers une figure clinique nouvelle, celle de l’ « état-limite » qui connaît de multiples avatars et résiste aux classifications.
Nombre d’essais sur le « malaise » entremêlent clinique individuelle et spéculations sur la culture, à partir du concept-clé de « désymbolisation ». La carence de Loi et de Père symbolique semble toutefois une explication insuffisante, tout comme la lecture inverse qui pousse à la fuite en avant libertaire. Notre lecture de Lacan refuse de s’inscrire dans ce dualisme Anciens/Modernes, et met l’accent sur la catégorie d’Idéal du Moi et de « trait unaire » qui suggère un nouage du symbolique avec l’imaginaire, loin de les opposer ; celui-ci joue un rôle essentiel, en permettant au symbolique de s’inscrire. La symbolisation est donc un processus plus qu’un état, dans lequel le sujet se trouve confronté, dans l’ambivalence, à la question de ses limites. Il doit convertir le Moi idéal en Idéal du Moi.
C’est ce à quoi s’emploient les mythes, qui étayent, tels des totems médiateurs, le travail de subjectivation, en engageant les sujets dans un processus identificatoire et « transfictionnel » qui produit des effets créatifs. A notre époque de désenchantement du monde, les mythes disponibles ne sont que de quasi-mythes « évasifs », sur fond de malaise et de mort de Dieu. Mais la littérature populaire, notamment celle qui s’adresse aux adolescents, comme certains récits de vampires, propose des « romans narcissiques », où l’Œdipe passe désormais au second plan. Elle revisite le personnage d’Hamlet.
Paradoxalement, les figures des mystiques, adeptes des expériences-limites et imprégnés d’ambivalence, proches de Lacan par leur théologie « négative » de la kénose et leur parole « apophatique », qui cultive la perte, retrouvent également une actualité, ainsi que la figure de l’apôtre Paul, lue par Agamben. Sa christologie du Dieu faible, abaissé, soumis au manque, résonne comme une déconstruction. Elle ouvre à un « temps de la fin », « temps qui reste », qui suspend les identités, désamorce les pouvoirs et rend possible, peut-être, une « promesse » et une « foi » au sens de Derrida, dans une logique ambivalente du sacré où l’idéal voisine avec l’abject.
Dès lors, la cure ne devrait-elle pas, en renonçant à une approche trop nosographique et trop centrée sur la castration symbolique, s’attacher à retrouver la trace féconde et vivifiante du trait unaire, c’est-à-dire laisser une place à l’imaginaire ? Ainsi l’analyse jouerait-elle le rôle d’une sorte de « chambre claire » : en laissant affleurer les « mythes » (ou quasi-mythes), dont celui de Persée vaut comme paradigme du combat que tout analysant a à mener. Il s’agit d’ouvrir l’espace du pharmakon, puisque l’ambivalence de l’Idéal est inscrite comme un risque impossible à évacuer. Mais c’est peut-être au prix de ce risque (qui est aussi un risque partagé, jusqu’à un certain point, par l’analyste) , celui de la chute, du « skandalon », que l’on peut espérer que le sujet se déprenne du Moi idéal et de ses pièges pour opérer un autre nouage, jamais prévisible ni assuré d’avance, et toujours au voisinage du « trou » : une nomination, un sinthome.