Books/Edites Volumes by Bianca Botea

Ce volume 3 ( « inédit ») de mon habilitation à diriger des recherches s’inscrit dans une anthrop... more Ce volume 3 ( « inédit ») de mon habilitation à diriger des recherches s’inscrit dans une anthropologie de la ville, et plus précisément des transformations urbaines et des attachements.
Les terrains de recherche ont été ici le quartier lyonnais de la Duchère et le Centre civique de la ville de Braşov en Transylvanie. Sur le terrain lyonnais, j’ai analysé les premières réactions à la politique nationale de rénovation urbaine (entraînant des démolitions massives et des restructurations du quartier), et j’ai mis en lumière des divergences dans les conceptions de l’habiter au sein d’acteurs urbains concernés par ce projet, des résidents aux aménageurs. Ces visions contrastées s’expriment, entre autres, dans les représentations de l’espace et les rapports au temps qui organisent ces conceptions et pratiques d’habiter. J’ai aussi montré que la logique d’aménagement et de développement urbain reposait sur une perspective du changement urbain comme transition, alors que l’approche de l’habiter relevait des rapports d’attachement.
Ces premières propositions de recherche issues du terrain français ont été approfondies par d’autres perspectives théoriques et méthodologiques à partir de l’enquête à Braşov. La zone du Centre civique a été affectée par des démolitions et des restructurations par vagues successives depuis l’époque du communisme jusqu’à nos jours, ce qui m’a amenée à m’interroger sur le renouvellement des repères spatio-temporels des individus face à ces transformations et la reformulation des attachements. En plus d’une méthodologie « sédentaire », d’analyse des représentations et narrative utilisée à la Duchère, j’ai adopté une approche de la marche en accompagnant mes interlocuteurs dans leurs itinéraires quotidiens, et en réalisant des ethnographies mobiles et audiovisuelles à l’aide d’une caméra GoPro portée par eux. Ce travail propose ainsi une anthropologie écologique des attachements et des transformations urbaines, basée sur une analyse de la perception en mouvement des environnements urbains. Cette démarche a permis d’identifier quelques mécanismes récurrents dans la construction d’un sentiment familier avec la ville et d’un rapport d’attachement, ainsi que dans les mobilités et la fréquentation des espaces urbains : la mise en place de sentiers familiers, un principe d’économie de déplacements, la construction de repères spatio-temporels par des affordances de type mémoriel (les lieux d’affection, les arbres, etc.), les ambiances sensorielles.
Les apports de ce travail de recherche se situent à mes yeux à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, l’approche écologique du changement et des attachements propose une perspective d’anthropologie urbaine qui permet d’explorer la complexité des milieux urbains et leur dimension processuelle, aspects plus difficilement saisissables uniquement par les méthodes de l’observation et de l’entretien. L’anthropologie des villes postsocialistes est peu développée dans l’espace de recherche francophone, et dans la littérature anthropologique internationale sur ce sujet la perspective écologique par des captations embarquées est aussi plus rare. Il en est de même pour les travaux réalisés jusqu’à présent sur les attachements, ces études se limitent généralement à la dimension narrative et à une approche des représentations. Dans mes recherches, j’ai pu adopter une double perspective, d’une part une conception de l’attachement comme lien de type affectif, qui est par ailleurs l’approche dominante dans les travaux existants ; d’autre part, une perspective des attachements comme des compétences dynamiques de type écologique, compétences des individus de se rendre familier un environnement continuellement changeant, ou parfois hostile.
Dans un autre temps, ma recherche s’inscrit dans la continuité des travaux en sciences sociales qui font usage des techniques audiovisuelles embarquées et prolonge certains d’entre eux. Elle prend ses distances avec la position d’« extériorité » du scientifique, proposant plutôt que ce dernier accompagne ses interlocuteurs dans l’enquête comme un acteur à part entière de cet environnement urbain, en immersion longue sur le terrain. Mon travail insiste aussi sur les avantages d’une inversion de la position de l’observateur, rendue possible par le fait que les personnes effectuent elles-mêmes les enregistrements audiovisuels de leur propre réalité. Enfin, mon approche propose une démarche de « science publique » et coopérative avec les acteurs étudiés, et s’inscrit dans des interrogations récentes sur les visées ontologiques de nos démarches de recherche, au-delà de celles épistémologiques, en explorant le potentiel de care de la recherche (urbaine).

Dans le volume 2 de mon habilitation à diriger des recherches, j’ai abordé le renouvellement des ... more Dans le volume 2 de mon habilitation à diriger des recherches, j’ai abordé le renouvellement des questions des nationalismes et de l’ethnicité dans les contextes postsocialistes en Transylvanie et dans le Banat roumain dans les années 2000, en choisissant l’angle du patrimoine et de la mémoire. J’ai mis en avant la notion de territoire-patrimoine et de territoire-mémoire pour montrer, ce que je pourrais appeler aujourd’hui un rapport d’attachement à la Transylvanie observé dans mon terrain de recherche dans la ville de Cluj-Napoca. Cet espace historiquement disputé entre deux États-nations crée encore autour de lui certaines tensions et une mémoire historique voire une « postmémoire » (en la reprenant Marianne Hirsch), élargie à des générations plus jeunes. J’ai mis en lumière ces phénomènes en ethnographiant des controverses toponymiques, muséales et d’usage des espaces urbains à Cluj-Napoca.
Le deuxième terrain de recherche dans le Banat, une autre région multiethnique historique partagée entre la Roumanie, la Serbie, la Hongrie, a approfondi cette articulation entre les pratiques de cohabitation et les questions du territoire, du patrimoine, et de la mémoire, à partir d’une enquête de terrain dans la ville de Jimbolia. Je me suis appuyée ici sur de nouveaux analyseurs, comme la mobilité, comprise sous l’angle des pratiques de la frontière, de la migration et du tourisme de racines. J’ai montré que ces dimensions jouaient un rôle central dans les dynamiques de revitalisation urbaine et de patrimonialisation après la crise industrielle postcommuniste de cette petite ville de frontière.

Editions des Archives contemporaines, 2022
Cet ouvrage collectif propose d’aborder l’articulation entre diversité et citoyenneté à partir d’... more Cet ouvrage collectif propose d’aborder l’articulation entre diversité et citoyenneté à partir d’une pluralité de perspectives disciplinaires et de sites nationaux. Il met en lumière des situations institutionnelles, publiques et domestiques à travers lesquelles se formulent aujourd’hui des expériences et des discours d’affirmation, de défense ou de transmission des diversités, mais aussi des biens communs : pratiques de patrimonialisation et formes d’engagement pour des causes environnementales et démocratiques, expériences de sensibilisation aux droits des « minorités », actions de résistance face à des réhabilitations urbaines, pratiques familiales et d’adoption, dispositifs éducatifs d’apprentissage de la citoyenneté, ainsi que des propositions philosophiques pour penser les questions de diversité et de citoyenneté. Dans son ensemble, l’ouvrage met en lumière les tensions et les médiations entre des formes de citoyenneté et de diversité de statut et d’expérience, laissant entrevoir leur apprentissage comme un acte de transmission de type classique (émetteur/récepteur) ou comme une pratique d’éducation à l’attention et de care.

(French Version Below)
(Table of Contents Below)
The process of constructing Transylvania’s m... more (French Version Below)
(Table of Contents Below)
The process of constructing Transylvania’s memory-scape and cultural heritage has its roots in a historical event, a change in state borders in 1920. This event has generated different and contested official narratives connected to two nation-building processes and two neighboring states. What has become today of this historical memory sometimes related to a national traumatic experience or, in an opposite way, to a high point (haut-lieu) of history and national glory? How does a territory with flexible borders and with an almost inexistent administrative framework become a performative and sensitive category? In the European Union enlargement context, this question evokes not only a shifting border problem, but tensions related to the sharing of a territory and of an everyday space of living together in a multi-ethnic context. Based on anthropological research conducted mainly in Cluj-Napoca (Romania), this book brings in different urban places, museums, urban festivals, and organizations where Transylvania is constructed as a contested memory-scape and cultural heritage involving local, national, cross-border or transnational dimensions. Here, one follows the various expressions of past renewals which point to the recent dynamics of nationalism, regionalism and ethnicity in the region, and their effects on the conceptualization of territorial space. Lastly, these negotiations of the past, observed through the different field sites, lead to an examination of the construction of public space in a context of linguistic and religious diversity.
Résumé
La fabrication de la Transylvanie comme paysage mémoriel et patrimonial s’enracine dans un événement historique ancien, un changement de frontières étatiques en 1920. Ce dernier a fait émerger des narrations officielles différentes voire conflictuelles rattachées à deux constructions nationales et à deux pays voisins. Que reste-t-il aujourd’hui de cette mémoire historique renvoyant à une expérience nationale traumatique, d’une part, et à un haut-lieu d’histoire et de gloire nationales, d’autre part ? Comment un espace à contours flous et sans assise administrative donne-t-il lieu à une catégorie sensible et performative ? À l’heure de l’élargissement européen, cette réflexion ne relève plus uniquement d’une logique de changement de frontières mais révèle des tensions relatives à la cohabitation sur un même territoire d’une diversité de populations. Cet ouvrage, fondé sur une recherche réalisée principalement dans la ville de Cluj-Napoca en Roumanie, nous mène à travers plusieurs lieux, musées, fêtes urbaines, structures associatives, espaces ordinaires de la ville qui, aujourd’hui, participent de ce paysage mémoriel et patrimonial compétitif se déployant à une échelle locale, nationale, transfrontalière et transnationale. Là, peuvent s’observer des phénomènes de production ou d’actualisation du passé, permettant de s’interroger sur les dynamiques de renouvellement du nationalisme, du régionalisme et de l’ethnicité en Europe, ainsi que des conceptions du territoire associées à ces pratiques. Enfin, ils mettent en avant la complexité des processus de fabrication de l’espace public en contexte plurilinguistique et pluriconfessionnel.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION............................................................................................ 9
PREMIÈRE PARTIE
Chemins d’une recherche
1. La Transylvanie : territoire frontalier, territoire à frontières .................. 15
2. Un territoire en partage : questions de cohabitation et
présences du passé ............................................................................... 27
3. Objets et terrains................................................................................. 49
DEUXIÈME PARTIE
Les territoires de coexistence
1. Des empires multiethniques aux États-nations : cadre historique .. 57
2. Histoires de la ville : Cluj-Napoca, Cluj, Kolozsvár, Klausenburg ...... 67
3. De l’espace au territoire : la compétition pour l’occupation
symbolique de l’espace ....................................................................... 81
1. Usages de la langue dans l’espace public ............................ 81
2. Controverses autour du patrimoine bâti et des vestiges
archéologiques........................................................................ 90
4. Festivités urbaines : foire artisanale, musiques et danses
folkloriques .......................................................................................... 101
5. Musées et territoires en partage ....................................................... 115
1. Musées, nationalisme et territoire ....................................... 116
2. Approche ethnographique des musées ................................ 123
3. Institutionnalisation de la mémoire et de l’oubli .................... 127
4. Changements dans les pratiques muséales ? « Politique de
la différence » et coexistence des récits patrimoniaux ............... 139
6. Les territoires de la patrie : Erdély ..................................................... 151
1. La production d’un territoire à soi, entre patrie hongroise
et espace étatique roumain ....................................................... 151
2. Territoires à géométrie variable ............................................. 166
7. Le territoire-patrimoine : l’entre-soi et la coexistence ........................ 187
TROISIÈME PARTIE
Coexistence et négociation sociale. Les territoires de projet
1. Provincia, le projet d’expérimentation d’une autre Transylvanie ……. 203
1. L’émergence d’un nouveau discours sur la Transylvanie
après 1989 ................................................................................. 203
• Le contexte .............................................................................. 204
• Acteurs et étapes ..................................................................... 207
2. La production sociale et politique d’une singularité
transylvaine ................................................................................ 223
2. Le cohabiter par le prisme de la négociation des appartenances
identitaires et territoriales......................................................................... 237
1. Communautés et espace public ............................................. 238
2. La dynamique du lien et de la séparation ethnique :
une approche de la situation ...................................................... 248
3. Rigidité ou fluidité des frontières ethniques : entre discours
et pratiques .................................................................................... 254
QUATRIÈME PARTIE
Territoires de culture et territoires d’action
1. Le territoire comme espace de cohérence culturelle ? ........................ 265
1. Régionalismes et régionalisation. L’Europe comme moteur
de recompositions sociales et territoriales .................................. 265
2. Le territoire comme aire culturelle .......................................... 277
2. Dé(re)territorialisations ....................................................................... 285
1. Territoires de négociation ...................................................... 285
2. Territoires d’expérience ......................................................... 290
3. Territoires de projet. Acteurs et échelles des territoires ........ 293
4. Territoires-mémoires, territoires d’histoire. Conclusions et
perspectives .............................................................................. 298
BIBLIOGRAPHIE
315
TABLE DES ANNEXES ...........................................................
Papers by Bianca Botea

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2019
This Traversal proposes a multidisciplinary analysis of urban transformations and in particular u... more This Traversal proposes a multidisciplinary analysis of urban transformations and in particular urban renewal from the perspective of the production of knowledge by proximity or familiarity. We want to look at urban renewal as a space of resources, links, actions, categories and cognitive universes in which the researcher participates alongside other field actors. This perspective of analysis, which places the researcher within people on the ground, is almost absent from studies on urban renewal in France despite the profusion of this research field. This work was born from a "post-survey" meeting between researchers from various disciplines, which conducted research in different periods on an over-researched ground, the Lyon district La Duchère. What did researchers have in common in the way they entered and experienced their fieldwork, their objects or relations with survey interlocutors? Basically, based on case studies relating to the Lyon district La Duchère, this Traversal extends these reflections to other fieldworks.

EspacesTemps.net , 2019
This Traversal proposes a multidisciplinary analysis of urban transformations and in particular u... more This Traversal proposes a multidisciplinary analysis of urban transformations and in particular urban renewal from the perspective of the production of knowledge by proximity or familiarity. We want to look at urban renewal as a space of resources, links, actions, categories and cognitive universes in which the researcher participates alongside other field actors. This perspective of analysis, which places the researcher within people on the ground, is almost absent from studies on urban renewal in France despite the profusion of this research field. This work was born from a "post-survey" meeting between researchers from various disciplines, which conducted research in different periods on an over-researched ground, the Lyon district La Duchère. What did researchers have in common in the way they entered and experienced their fieldwork, their objects or relations with survey interlocutors? Basically, based on case studies relating to the Lyon district La Duchère, this Traversal extends these reflections to other fieldworks.
Lyon, métropole en mouvement (eds. R. Verhage, A. Mercier), 2023
This article presents the dynamics of a longitudinal anthropological research that took place in ... more This article presents the dynamics of a longitudinal anthropological research that took place in the Duchère district between 2007 and 2018, showing the evolution of the research issues and approaches. This article will focus in particular on the move towards an approach based on attachments and the familiar city, two notions that help us understand the relationship between city dwellers and urban transformations. The research context is that of the district's urban renewal program, which began in 2003 and is still underway today.
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2014
This paper is intended to explore the dynamic of rebuilding memories and heritages in an urban co... more This paper is intended to explore the dynamic of rebuilding memories and heritages in an urban context located in a border area which is heavily marked by transborder mobility and crisis related to de-industrialization. My analysis is aimed to show how the socioeconomic change – and especially the post-crisis developmental politics that reconfigured urban territory as transnational – influenced the urban landscape. More specifically, I question how the above processes impacted on the maintenance of urban memory and cultural heritage and also the other way round: how memories of multicultural coexistence help revitalizing the urban landscape. The memorial dimension is approached through the public politics of heritage as well as on the level of everyday practices.
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2008
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2006
Cet article est une réflexion à partir d'une enquête de terrain anthropologique réalisée dans... more Cet article est une réflexion à partir d'une enquête de terrain anthropologique réalisée dans le quartier en rénovation urbaine de la Duchère, à Lyon. Il tente de placer les processus de connaissance et autres résultats de cette recherche dans les environnements d'enquête d'où ils ont émergé et dans les relations de familiarité et d'attachement instaurées au sein d'eux. Ce détour par les expériences de connaissance est une occasion de revenir sur la nature du travail scientifique en contexte de rénovation urbaine et de reposer dans d'autres termes, à partir d'une perspective d'anthropologie écologique, les questions de restitution, de réflexivité et d'anthropologie publique.
This paper is intended to explore the dynamic of rebuilding memories and heritages in an urban co... more This paper is intended to explore the dynamic of rebuilding memories and heritages in an urban context located in a border area which is heavily marked by transborder mobility and crisis related to de-industrialization. My analysis is aimed to show how the socioeconomic change – and especially the post-crisis developmental politics that reconfigured urban territory as transnational – influenced the urban landscape. More specifically, I question how the above processes impacted on the maintenance of urban memory and cultural heritage and also the other way round: how memories of multicultural coexistence help revitalizing the urban landscape. The memorial dimension is approached through the public politics of heritage as well as on the level of everyday practices.
Vient de paraître : TERRITOIRES EN PARTAGE. Politiques du passé et expériences de cohabitation en... more Vient de paraître : TERRITOIRES EN PARTAGE. Politiques du passé et expériences de cohabitation en Transylvanie, de Bianca BOTEA, aux éditions Petra La fabrication de la Transylvanie comme paysage mémoriel et patrimonial s’enracine dans un événement historique ancien, un changement de frontières étatiques en 1920. Ce dernier a fait émerger des narrations officielles différentes voire conflictuelles rattachées à deux constructions nationales et à deux pays voisins. Que reste-t-il aujourd’hui de..
Balkanologie, 2020
« Vintilă n'est plus là » [Vintilă nu mai e] a été l'intitulé spontanément proposé par un petit g... more « Vintilă n'est plus là » [Vintilă nu mai e] a été l'intitulé spontanément proposé par un petit groupe sur un réseau social, dont nous faisions partie. Étudiants de Vintilă Mihăilescu dans les années 1990, exerçant aujourd'hui l'anthropologie en diaspora, nous nous sommes rassemblés virtuellement, touchés par le poids insoutenable de la nouvelle de sa disparition.
Journal des anthropologues, 2007
Si la Transylvanie n'a presque jamais constitué un territoire administratif de la Roumanie, elle ... more Si la Transylvanie n'a presque jamais constitué un territoire administratif de la Roumanie, elle est en revanche une région historique fortement chargée Mémoires et patrimonialisation dans un territoire-frontière : la Transylvanie

Civilisations, 2012
Des jeux d'usages d'une catégorie balkanique La Transylvanie, un territoire aux marges des Balkan... more Des jeux d'usages d'une catégorie balkanique La Transylvanie, un territoire aux marges des Balkans Bianca BOTEA-COULAUD Résumé : La Transylvanie, espace situé géographiquement en marge des Balkans, questionne les frontières de cet espace et sa construction. S'appuyant sur une étude ethnologique menée dans cette région, cet article montre que la catégorie « balkanique » est réactivée dans le contexte de l'émergence des discours de régionalisation en Roumanie à partir des années 2000, et plus précisément du renouvellement du discours sur la Transylvanie. Mais au delà de sa position aux marges des Balkans, l'intérêt d'une étude de cas sur la Transylvanie est double. D'une part, sa construction en tant que catégorie performative et comme « espace à frontières » est une dimension à interroger aussi dans la construction des Balkans. D'autre part, les deux catégories convoquent la notion d' « aire culturelle ». Remettant en question la conception de la Transylvanie et des Balkans comme « aires culturelles », je propose de penser ces espaces en privilégiant une perspective dynamique et pragmatique plutôt qu'essentialiste et culturaliste.
Balkanologie, 2020
Association française d'études sur les Balkans (Afebalk) Référence électronique Bianca Botea et V... more Association française d'études sur les Balkans (Afebalk) Référence électronique Bianca Botea et Vintilă Mihăilescu, « Introduction. Mémoires performatives : faire des passés et des présents »,
Editions des Archives Contemporaines, 2022
Issu de différents chantiers de travail commun entre plusieurs disciplines au sein de l’Universit... more Issu de différents chantiers de travail commun entre plusieurs disciplines au sein de l’Université
Lyon 2, élargis ensuite à d’autres réseaux de recherche, ce volume met en lumière quelques manifestations
contemporaines des discours et des pratiques de la diversité et de la citoyenneté. L’angle abordé est celui
pluridisciplinaire, par le prisme de quelques études de cas menées principalement en Europe, avec un
éclairage venant aussi des sociétés d’Afrique. L’introduction de ce volume présentera quelques clés de
lecture transversales à cette pluralité d’approches.
Uploads
Books/Edites Volumes by Bianca Botea
Les terrains de recherche ont été ici le quartier lyonnais de la Duchère et le Centre civique de la ville de Braşov en Transylvanie. Sur le terrain lyonnais, j’ai analysé les premières réactions à la politique nationale de rénovation urbaine (entraînant des démolitions massives et des restructurations du quartier), et j’ai mis en lumière des divergences dans les conceptions de l’habiter au sein d’acteurs urbains concernés par ce projet, des résidents aux aménageurs. Ces visions contrastées s’expriment, entre autres, dans les représentations de l’espace et les rapports au temps qui organisent ces conceptions et pratiques d’habiter. J’ai aussi montré que la logique d’aménagement et de développement urbain reposait sur une perspective du changement urbain comme transition, alors que l’approche de l’habiter relevait des rapports d’attachement.
Ces premières propositions de recherche issues du terrain français ont été approfondies par d’autres perspectives théoriques et méthodologiques à partir de l’enquête à Braşov. La zone du Centre civique a été affectée par des démolitions et des restructurations par vagues successives depuis l’époque du communisme jusqu’à nos jours, ce qui m’a amenée à m’interroger sur le renouvellement des repères spatio-temporels des individus face à ces transformations et la reformulation des attachements. En plus d’une méthodologie « sédentaire », d’analyse des représentations et narrative utilisée à la Duchère, j’ai adopté une approche de la marche en accompagnant mes interlocuteurs dans leurs itinéraires quotidiens, et en réalisant des ethnographies mobiles et audiovisuelles à l’aide d’une caméra GoPro portée par eux. Ce travail propose ainsi une anthropologie écologique des attachements et des transformations urbaines, basée sur une analyse de la perception en mouvement des environnements urbains. Cette démarche a permis d’identifier quelques mécanismes récurrents dans la construction d’un sentiment familier avec la ville et d’un rapport d’attachement, ainsi que dans les mobilités et la fréquentation des espaces urbains : la mise en place de sentiers familiers, un principe d’économie de déplacements, la construction de repères spatio-temporels par des affordances de type mémoriel (les lieux d’affection, les arbres, etc.), les ambiances sensorielles.
Les apports de ce travail de recherche se situent à mes yeux à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, l’approche écologique du changement et des attachements propose une perspective d’anthropologie urbaine qui permet d’explorer la complexité des milieux urbains et leur dimension processuelle, aspects plus difficilement saisissables uniquement par les méthodes de l’observation et de l’entretien. L’anthropologie des villes postsocialistes est peu développée dans l’espace de recherche francophone, et dans la littérature anthropologique internationale sur ce sujet la perspective écologique par des captations embarquées est aussi plus rare. Il en est de même pour les travaux réalisés jusqu’à présent sur les attachements, ces études se limitent généralement à la dimension narrative et à une approche des représentations. Dans mes recherches, j’ai pu adopter une double perspective, d’une part une conception de l’attachement comme lien de type affectif, qui est par ailleurs l’approche dominante dans les travaux existants ; d’autre part, une perspective des attachements comme des compétences dynamiques de type écologique, compétences des individus de se rendre familier un environnement continuellement changeant, ou parfois hostile.
Dans un autre temps, ma recherche s’inscrit dans la continuité des travaux en sciences sociales qui font usage des techniques audiovisuelles embarquées et prolonge certains d’entre eux. Elle prend ses distances avec la position d’« extériorité » du scientifique, proposant plutôt que ce dernier accompagne ses interlocuteurs dans l’enquête comme un acteur à part entière de cet environnement urbain, en immersion longue sur le terrain. Mon travail insiste aussi sur les avantages d’une inversion de la position de l’observateur, rendue possible par le fait que les personnes effectuent elles-mêmes les enregistrements audiovisuels de leur propre réalité. Enfin, mon approche propose une démarche de « science publique » et coopérative avec les acteurs étudiés, et s’inscrit dans des interrogations récentes sur les visées ontologiques de nos démarches de recherche, au-delà de celles épistémologiques, en explorant le potentiel de care de la recherche (urbaine).
Le deuxième terrain de recherche dans le Banat, une autre région multiethnique historique partagée entre la Roumanie, la Serbie, la Hongrie, a approfondi cette articulation entre les pratiques de cohabitation et les questions du territoire, du patrimoine, et de la mémoire, à partir d’une enquête de terrain dans la ville de Jimbolia. Je me suis appuyée ici sur de nouveaux analyseurs, comme la mobilité, comprise sous l’angle des pratiques de la frontière, de la migration et du tourisme de racines. J’ai montré que ces dimensions jouaient un rôle central dans les dynamiques de revitalisation urbaine et de patrimonialisation après la crise industrielle postcommuniste de cette petite ville de frontière.
(Table of Contents Below)
The process of constructing Transylvania’s memory-scape and cultural heritage has its roots in a historical event, a change in state borders in 1920. This event has generated different and contested official narratives connected to two nation-building processes and two neighboring states. What has become today of this historical memory sometimes related to a national traumatic experience or, in an opposite way, to a high point (haut-lieu) of history and national glory? How does a territory with flexible borders and with an almost inexistent administrative framework become a performative and sensitive category? In the European Union enlargement context, this question evokes not only a shifting border problem, but tensions related to the sharing of a territory and of an everyday space of living together in a multi-ethnic context. Based on anthropological research conducted mainly in Cluj-Napoca (Romania), this book brings in different urban places, museums, urban festivals, and organizations where Transylvania is constructed as a contested memory-scape and cultural heritage involving local, national, cross-border or transnational dimensions. Here, one follows the various expressions of past renewals which point to the recent dynamics of nationalism, regionalism and ethnicity in the region, and their effects on the conceptualization of territorial space. Lastly, these negotiations of the past, observed through the different field sites, lead to an examination of the construction of public space in a context of linguistic and religious diversity.
Résumé
La fabrication de la Transylvanie comme paysage mémoriel et patrimonial s’enracine dans un événement historique ancien, un changement de frontières étatiques en 1920. Ce dernier a fait émerger des narrations officielles différentes voire conflictuelles rattachées à deux constructions nationales et à deux pays voisins. Que reste-t-il aujourd’hui de cette mémoire historique renvoyant à une expérience nationale traumatique, d’une part, et à un haut-lieu d’histoire et de gloire nationales, d’autre part ? Comment un espace à contours flous et sans assise administrative donne-t-il lieu à une catégorie sensible et performative ? À l’heure de l’élargissement européen, cette réflexion ne relève plus uniquement d’une logique de changement de frontières mais révèle des tensions relatives à la cohabitation sur un même territoire d’une diversité de populations. Cet ouvrage, fondé sur une recherche réalisée principalement dans la ville de Cluj-Napoca en Roumanie, nous mène à travers plusieurs lieux, musées, fêtes urbaines, structures associatives, espaces ordinaires de la ville qui, aujourd’hui, participent de ce paysage mémoriel et patrimonial compétitif se déployant à une échelle locale, nationale, transfrontalière et transnationale. Là, peuvent s’observer des phénomènes de production ou d’actualisation du passé, permettant de s’interroger sur les dynamiques de renouvellement du nationalisme, du régionalisme et de l’ethnicité en Europe, ainsi que des conceptions du territoire associées à ces pratiques. Enfin, ils mettent en avant la complexité des processus de fabrication de l’espace public en contexte plurilinguistique et pluriconfessionnel.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION............................................................................................ 9
PREMIÈRE PARTIE
Chemins d’une recherche
1. La Transylvanie : territoire frontalier, territoire à frontières .................. 15
2. Un territoire en partage : questions de cohabitation et
présences du passé ............................................................................... 27
3. Objets et terrains................................................................................. 49
DEUXIÈME PARTIE
Les territoires de coexistence
1. Des empires multiethniques aux États-nations : cadre historique .. 57
2. Histoires de la ville : Cluj-Napoca, Cluj, Kolozsvár, Klausenburg ...... 67
3. De l’espace au territoire : la compétition pour l’occupation
symbolique de l’espace ....................................................................... 81
1. Usages de la langue dans l’espace public ............................ 81
2. Controverses autour du patrimoine bâti et des vestiges
archéologiques........................................................................ 90
4. Festivités urbaines : foire artisanale, musiques et danses
folkloriques .......................................................................................... 101
5. Musées et territoires en partage ....................................................... 115
1. Musées, nationalisme et territoire ....................................... 116
2. Approche ethnographique des musées ................................ 123
3. Institutionnalisation de la mémoire et de l’oubli .................... 127
4. Changements dans les pratiques muséales ? « Politique de
la différence » et coexistence des récits patrimoniaux ............... 139
6. Les territoires de la patrie : Erdély ..................................................... 151
1. La production d’un territoire à soi, entre patrie hongroise
et espace étatique roumain ....................................................... 151
2. Territoires à géométrie variable ............................................. 166
7. Le territoire-patrimoine : l’entre-soi et la coexistence ........................ 187
TROISIÈME PARTIE
Coexistence et négociation sociale. Les territoires de projet
1. Provincia, le projet d’expérimentation d’une autre Transylvanie ……. 203
1. L’émergence d’un nouveau discours sur la Transylvanie
après 1989 ................................................................................. 203
• Le contexte .............................................................................. 204
• Acteurs et étapes ..................................................................... 207
2. La production sociale et politique d’une singularité
transylvaine ................................................................................ 223
2. Le cohabiter par le prisme de la négociation des appartenances
identitaires et territoriales......................................................................... 237
1. Communautés et espace public ............................................. 238
2. La dynamique du lien et de la séparation ethnique :
une approche de la situation ...................................................... 248
3. Rigidité ou fluidité des frontières ethniques : entre discours
et pratiques .................................................................................... 254
QUATRIÈME PARTIE
Territoires de culture et territoires d’action
1. Le territoire comme espace de cohérence culturelle ? ........................ 265
1. Régionalismes et régionalisation. L’Europe comme moteur
de recompositions sociales et territoriales .................................. 265
2. Le territoire comme aire culturelle .......................................... 277
2. Dé(re)territorialisations ....................................................................... 285
1. Territoires de négociation ...................................................... 285
2. Territoires d’expérience ......................................................... 290
3. Territoires de projet. Acteurs et échelles des territoires ........ 293
4. Territoires-mémoires, territoires d’histoire. Conclusions et
perspectives .............................................................................. 298
BIBLIOGRAPHIE
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TABLE DES ANNEXES ...........................................................
Papers by Bianca Botea
Lyon 2, élargis ensuite à d’autres réseaux de recherche, ce volume met en lumière quelques manifestations
contemporaines des discours et des pratiques de la diversité et de la citoyenneté. L’angle abordé est celui
pluridisciplinaire, par le prisme de quelques études de cas menées principalement en Europe, avec un
éclairage venant aussi des sociétés d’Afrique. L’introduction de ce volume présentera quelques clés de
lecture transversales à cette pluralité d’approches.
Les terrains de recherche ont été ici le quartier lyonnais de la Duchère et le Centre civique de la ville de Braşov en Transylvanie. Sur le terrain lyonnais, j’ai analysé les premières réactions à la politique nationale de rénovation urbaine (entraînant des démolitions massives et des restructurations du quartier), et j’ai mis en lumière des divergences dans les conceptions de l’habiter au sein d’acteurs urbains concernés par ce projet, des résidents aux aménageurs. Ces visions contrastées s’expriment, entre autres, dans les représentations de l’espace et les rapports au temps qui organisent ces conceptions et pratiques d’habiter. J’ai aussi montré que la logique d’aménagement et de développement urbain reposait sur une perspective du changement urbain comme transition, alors que l’approche de l’habiter relevait des rapports d’attachement.
Ces premières propositions de recherche issues du terrain français ont été approfondies par d’autres perspectives théoriques et méthodologiques à partir de l’enquête à Braşov. La zone du Centre civique a été affectée par des démolitions et des restructurations par vagues successives depuis l’époque du communisme jusqu’à nos jours, ce qui m’a amenée à m’interroger sur le renouvellement des repères spatio-temporels des individus face à ces transformations et la reformulation des attachements. En plus d’une méthodologie « sédentaire », d’analyse des représentations et narrative utilisée à la Duchère, j’ai adopté une approche de la marche en accompagnant mes interlocuteurs dans leurs itinéraires quotidiens, et en réalisant des ethnographies mobiles et audiovisuelles à l’aide d’une caméra GoPro portée par eux. Ce travail propose ainsi une anthropologie écologique des attachements et des transformations urbaines, basée sur une analyse de la perception en mouvement des environnements urbains. Cette démarche a permis d’identifier quelques mécanismes récurrents dans la construction d’un sentiment familier avec la ville et d’un rapport d’attachement, ainsi que dans les mobilités et la fréquentation des espaces urbains : la mise en place de sentiers familiers, un principe d’économie de déplacements, la construction de repères spatio-temporels par des affordances de type mémoriel (les lieux d’affection, les arbres, etc.), les ambiances sensorielles.
Les apports de ce travail de recherche se situent à mes yeux à plusieurs niveaux. Dans un premier temps, l’approche écologique du changement et des attachements propose une perspective d’anthropologie urbaine qui permet d’explorer la complexité des milieux urbains et leur dimension processuelle, aspects plus difficilement saisissables uniquement par les méthodes de l’observation et de l’entretien. L’anthropologie des villes postsocialistes est peu développée dans l’espace de recherche francophone, et dans la littérature anthropologique internationale sur ce sujet la perspective écologique par des captations embarquées est aussi plus rare. Il en est de même pour les travaux réalisés jusqu’à présent sur les attachements, ces études se limitent généralement à la dimension narrative et à une approche des représentations. Dans mes recherches, j’ai pu adopter une double perspective, d’une part une conception de l’attachement comme lien de type affectif, qui est par ailleurs l’approche dominante dans les travaux existants ; d’autre part, une perspective des attachements comme des compétences dynamiques de type écologique, compétences des individus de se rendre familier un environnement continuellement changeant, ou parfois hostile.
Dans un autre temps, ma recherche s’inscrit dans la continuité des travaux en sciences sociales qui font usage des techniques audiovisuelles embarquées et prolonge certains d’entre eux. Elle prend ses distances avec la position d’« extériorité » du scientifique, proposant plutôt que ce dernier accompagne ses interlocuteurs dans l’enquête comme un acteur à part entière de cet environnement urbain, en immersion longue sur le terrain. Mon travail insiste aussi sur les avantages d’une inversion de la position de l’observateur, rendue possible par le fait que les personnes effectuent elles-mêmes les enregistrements audiovisuels de leur propre réalité. Enfin, mon approche propose une démarche de « science publique » et coopérative avec les acteurs étudiés, et s’inscrit dans des interrogations récentes sur les visées ontologiques de nos démarches de recherche, au-delà de celles épistémologiques, en explorant le potentiel de care de la recherche (urbaine).
Le deuxième terrain de recherche dans le Banat, une autre région multiethnique historique partagée entre la Roumanie, la Serbie, la Hongrie, a approfondi cette articulation entre les pratiques de cohabitation et les questions du territoire, du patrimoine, et de la mémoire, à partir d’une enquête de terrain dans la ville de Jimbolia. Je me suis appuyée ici sur de nouveaux analyseurs, comme la mobilité, comprise sous l’angle des pratiques de la frontière, de la migration et du tourisme de racines. J’ai montré que ces dimensions jouaient un rôle central dans les dynamiques de revitalisation urbaine et de patrimonialisation après la crise industrielle postcommuniste de cette petite ville de frontière.
(Table of Contents Below)
The process of constructing Transylvania’s memory-scape and cultural heritage has its roots in a historical event, a change in state borders in 1920. This event has generated different and contested official narratives connected to two nation-building processes and two neighboring states. What has become today of this historical memory sometimes related to a national traumatic experience or, in an opposite way, to a high point (haut-lieu) of history and national glory? How does a territory with flexible borders and with an almost inexistent administrative framework become a performative and sensitive category? In the European Union enlargement context, this question evokes not only a shifting border problem, but tensions related to the sharing of a territory and of an everyday space of living together in a multi-ethnic context. Based on anthropological research conducted mainly in Cluj-Napoca (Romania), this book brings in different urban places, museums, urban festivals, and organizations where Transylvania is constructed as a contested memory-scape and cultural heritage involving local, national, cross-border or transnational dimensions. Here, one follows the various expressions of past renewals which point to the recent dynamics of nationalism, regionalism and ethnicity in the region, and their effects on the conceptualization of territorial space. Lastly, these negotiations of the past, observed through the different field sites, lead to an examination of the construction of public space in a context of linguistic and religious diversity.
Résumé
La fabrication de la Transylvanie comme paysage mémoriel et patrimonial s’enracine dans un événement historique ancien, un changement de frontières étatiques en 1920. Ce dernier a fait émerger des narrations officielles différentes voire conflictuelles rattachées à deux constructions nationales et à deux pays voisins. Que reste-t-il aujourd’hui de cette mémoire historique renvoyant à une expérience nationale traumatique, d’une part, et à un haut-lieu d’histoire et de gloire nationales, d’autre part ? Comment un espace à contours flous et sans assise administrative donne-t-il lieu à une catégorie sensible et performative ? À l’heure de l’élargissement européen, cette réflexion ne relève plus uniquement d’une logique de changement de frontières mais révèle des tensions relatives à la cohabitation sur un même territoire d’une diversité de populations. Cet ouvrage, fondé sur une recherche réalisée principalement dans la ville de Cluj-Napoca en Roumanie, nous mène à travers plusieurs lieux, musées, fêtes urbaines, structures associatives, espaces ordinaires de la ville qui, aujourd’hui, participent de ce paysage mémoriel et patrimonial compétitif se déployant à une échelle locale, nationale, transfrontalière et transnationale. Là, peuvent s’observer des phénomènes de production ou d’actualisation du passé, permettant de s’interroger sur les dynamiques de renouvellement du nationalisme, du régionalisme et de l’ethnicité en Europe, ainsi que des conceptions du territoire associées à ces pratiques. Enfin, ils mettent en avant la complexité des processus de fabrication de l’espace public en contexte plurilinguistique et pluriconfessionnel.
TABLE DES MATIÈRES
INTRODUCTION............................................................................................ 9
PREMIÈRE PARTIE
Chemins d’une recherche
1. La Transylvanie : territoire frontalier, territoire à frontières .................. 15
2. Un territoire en partage : questions de cohabitation et
présences du passé ............................................................................... 27
3. Objets et terrains................................................................................. 49
DEUXIÈME PARTIE
Les territoires de coexistence
1. Des empires multiethniques aux États-nations : cadre historique .. 57
2. Histoires de la ville : Cluj-Napoca, Cluj, Kolozsvár, Klausenburg ...... 67
3. De l’espace au territoire : la compétition pour l’occupation
symbolique de l’espace ....................................................................... 81
1. Usages de la langue dans l’espace public ............................ 81
2. Controverses autour du patrimoine bâti et des vestiges
archéologiques........................................................................ 90
4. Festivités urbaines : foire artisanale, musiques et danses
folkloriques .......................................................................................... 101
5. Musées et territoires en partage ....................................................... 115
1. Musées, nationalisme et territoire ....................................... 116
2. Approche ethnographique des musées ................................ 123
3. Institutionnalisation de la mémoire et de l’oubli .................... 127
4. Changements dans les pratiques muséales ? « Politique de
la différence » et coexistence des récits patrimoniaux ............... 139
6. Les territoires de la patrie : Erdély ..................................................... 151
1. La production d’un territoire à soi, entre patrie hongroise
et espace étatique roumain ....................................................... 151
2. Territoires à géométrie variable ............................................. 166
7. Le territoire-patrimoine : l’entre-soi et la coexistence ........................ 187
TROISIÈME PARTIE
Coexistence et négociation sociale. Les territoires de projet
1. Provincia, le projet d’expérimentation d’une autre Transylvanie ……. 203
1. L’émergence d’un nouveau discours sur la Transylvanie
après 1989 ................................................................................. 203
• Le contexte .............................................................................. 204
• Acteurs et étapes ..................................................................... 207
2. La production sociale et politique d’une singularité
transylvaine ................................................................................ 223
2. Le cohabiter par le prisme de la négociation des appartenances
identitaires et territoriales......................................................................... 237
1. Communautés et espace public ............................................. 238
2. La dynamique du lien et de la séparation ethnique :
une approche de la situation ...................................................... 248
3. Rigidité ou fluidité des frontières ethniques : entre discours
et pratiques .................................................................................... 254
QUATRIÈME PARTIE
Territoires de culture et territoires d’action
1. Le territoire comme espace de cohérence culturelle ? ........................ 265
1. Régionalismes et régionalisation. L’Europe comme moteur
de recompositions sociales et territoriales .................................. 265
2. Le territoire comme aire culturelle .......................................... 277
2. Dé(re)territorialisations ....................................................................... 285
1. Territoires de négociation ...................................................... 285
2. Territoires d’expérience ......................................................... 290
3. Territoires de projet. Acteurs et échelles des territoires ........ 293
4. Territoires-mémoires, territoires d’histoire. Conclusions et
perspectives .............................................................................. 298
BIBLIOGRAPHIE
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TABLE DES ANNEXES ...........................................................
Lyon 2, élargis ensuite à d’autres réseaux de recherche, ce volume met en lumière quelques manifestations
contemporaines des discours et des pratiques de la diversité et de la citoyenneté. L’angle abordé est celui
pluridisciplinaire, par le prisme de quelques études de cas menées principalement en Europe, avec un
éclairage venant aussi des sociétés d’Afrique. L’introduction de ce volume présentera quelques clés de
lecture transversales à cette pluralité d’approches.