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L'oeuvre d 'Ed Harris Appaloosa (2008), adaptée d'un roman de Robert B. Parker (2005), se distingue par son langage particulièrement soigné, où rien n'est laissé au hasard, dialogues, expressions, silences, auquel s'ajoute le soin apporté aux signes visuels qui caractérisent le genre. Elle est le produit d'une collaboration sans accroc entre le réalisateur, le scénariste Robert Knott et le romancier, si bien que Harris reconnaît sans ambages que le dialogue est issu à 85% des pages du roman 1 . La grammaire propre au Western, personnages, lieux, objets, situations icôniques est partout en évidence. En effet, Appaloosa reprend, arrange, réactive les thèmes, motifs, clichés, décors du Western classique, en respectant une nouvelle exigence, l'exactitude historique, qu'il partage avec toutes les productions actuelles, au cinéma comme à la télévision. 2 En somme, pour employer un terme que nous avons appliqué aux réécritures du corpus arthurien qui conservent tous les agrégats mythologiques en les adaptant au contexte historique véritable, Appaloosa est un film inclusif. C'est à dire, une oeuvre qui conserve l'acquis légendaire tout en respectant scrupuleusement le réalisme historique.

Il est difficile de résumer un roman aussi riche et dense que celui d'Anita Desai 1 . On peut retenir, entre autres motifs, celui de l'homme pour qui la poésie est une patrie imaginaire, un refuge face à la vulgarité, l'aridité, la médiocrité de la vie quotidienne. Ayant eu le redoutable privilège de rencontrer et d'interviewer son idéal, le poète Nur, Deven Sharma découvrira que les rapports privilégiés qu'il entretient avec ce dernier l'entraînent, de façon inattendue, dans une surenchère de contraintes matérielles, et menacent de dynamiter le peu de stabilité et de réputation familiale et professionnelle dont il dispose. Dans les dernières lignes du roman, rejetant enfin sa timidité paralysante, Deven est prêt à relever le défi. Le jeu se complique car nous sommes en Inde moderne, à l'orée des années 1980 (nulle date précise dans ce roman, mais on mentionne que le poète Faiz Ahmed Faiz est parti pour Beyrouth, ce qui situe l'action en 1979), marquée par la montée du matérialisme, du nationalisme hindou, et que la poésie qui fascine Deven est de langue ourdoue, donc, doublement étrangère à la vie quotidienne, car associée à la fois au frère ennemi pakistanais, et à un mode d'existence aristocratique en passe d'extinction depuis des lustres. Aller jusqu'au fond de la compréhension de ce roman c'est aussi, et surtout, décrypter la nature et la place de cette culture de référence qui semble anachronique dans l'Inde moderne où Deven Sharma traîne son mal de vivre.

Un Prince du Ve siècle » : Arthur et le roman historique au XXe siècle. (Le Roi Arthur au Miroir du Temps, Terre de Brume, 2007) La Matière de Bretagne rencontre le roman historique : Après le feu d'artifice tennysonien, le XXe siècle a redécouvert la Matière de Bretagne en se recentrant sur Arthur lui-même et en s'interrogeant sur sa réalité. L'intemporalité médiévale du corpus traditionnel avait longtemps brouillé la localisation historique d'Arthur et de son univers, même si la datation à la fin du Ve-début du VIe siècle n'a jamais été perdue de vue, tout en jurant (pour un oeil moderne) avec la couleur locale du Moyen Age (en somme, Arthur a toujours été un personnage historique). L'essor des réécritures arthuriennes au XXe siècle -et singulièrement à partir de 1950 -doit beaucoup à l'appropriation de la Matière par le genre-phare des temps modernes, le roman, et singulièrement par le roman historique. Exactitude de la reconstitution, épaisseur psychologique des personnages, les exigences formelles du roman historique portent en elles une redoutable difficulté : en effet, comment rendre un personnage historique accessible, voire sympathique, au lecteur moderne tout en reconstituant un VIe siècle forcément rude et barbare ? Comment concilier le souci de vraisemblance avec le besoin d'identification du public ? Dans le cas d'Arthur, la situation se complique, car l'exigence d'historicité se heurte aux spécificités arthuriennes : fallait-il donc, et jusqu'à quel point, évacuer le merveilleux, la trame légendaire ? Se défaire entièrement, ou partiellement, des personnages anachroniques ? Une fois décidée cette relocalisation de la Matière au VIe siècle, époque dont on ne sait pas grande chose, il fallait aussi décider de l'appartenance d'Arthur aux deux mondes constitutifs de cette Britannia menacée par les Saxons, celui des Celtes, celui des Romains, tout en rétablissant la continuité territoriale entre l'île et le reste du monde, où des royaumes germaniques font face à Byzance.

Paris X-Nanterre, automne 1998) Nous abordons ici une oeuvre de Durrell qui a pu sembler mineure après la grande messe du Quartet. En tout cas, elle a dérouté son public en 1970 et n'a pas vraiment retenu l'attention des critiques. Certes, après les expérimentations structurales du Quartet, ce "two-decker novel" semble bien sage : Tunc est un flashback qui démarre in media res (Felix Charlock s'apprête à quitter la Firme et relate le passé), dans Nunquam, Charlock narre la suite des événements depuis son séjour dans le sanatorium jusqu'à la mort de Julian et la destruction des contrats. La seule vraie zone d'ombre, fascinante, il est vrai, est ce qui est arrivé au narrateur entre les deux volumes (a-t-il été simplement blessé, ou lobotomisé ? Sa réconciliation avec la Firme, avec

En une des premières missions de conseillers militaires de l'époque moderne, les Etats-Unis organisèrent à la fin des années 1860 le recrutement d'une cinquantaine d'anciens officiers nordistes et sudistes par le Khédive d'Egypte. Celui-ci, désireux de faire appel à une nation sans visées coloniales, à la différence de la Grande Bretagne et de la Frane, avait à coeur la modernisation de son armée et de son Etat-Major, en vue d'une politique plus agressive en direction du sud. Cet épisode peu connu, qui témoigne des efforts déployés par le Khédive Ismaïl, avec le Canal de Suez nouvellement creuse, pour faire de l'Egypte une puissance indépendante et moderne, fut également un choc culturel entre les conseillers, nouvellement débarqués des champs de bataille de la Virginie, et les élites égyptiennes. Il s'ensuit que l'efficacité militaire de la mission a été parfois mise en doute. En revanche, plusieurs Américains participèrent à de grandes expéditions d'exploration et de cartographie, à peine moins ambitieuses que celles de Burton et de Speke. Aussi nous nous pencherons sur deux officiers , des plus originaux, Raleigh Colston 51825-1896) et Charles Chaillé-Long (1842-1917), tous deux francophones (Colston, professeur de français avant de devenir général confédéré, était le fils naturel de la Duchesse de Valmy; Chaillé-Long, capitaine nordiste, brillant polyglotte, étai d'origine huguenote et écrivit la plupart de ses ouvrages en français tout en possédant parfaitement l'arabe), tous deux particulièrement bien intégrés en Egypte khédiviale. Sans oublier William Loring (1818-1886), lui aussi général confédéré, et en même temps auteur d'une des plus féroces attaques contre la politique coloniale britannique. Nous ferons appel à leurs ouvrages pour non seulement rendre compte de leurs campagnes et explorations, mais pour mieux mettre en évidence leur découverte de l'Egypte et de ses habitants, leurs rapports privilégiés avec le Khédive et certains indigènes, et, inversement, leur relation parfois conflictuelle avec les Britanniques, en passe de prendre le contrôle de l'Egypte.

Deux auteurs britanniques de la deuxième moitié du XIXe siècle, Henry Rider Haggard (1856-1925) et William Morris (1834-1896), ont mis en scène des personnages de reines belles, semi-immortelles et tragiques dans leurs romans d'imagination. Si ces figures se rapprochent de la femme fatale archétypale, elles témoignent aussi de la volonté des deux auteurs de leur conférer une puissance et une autonomie inhabituelles. Chez Rider Haggard, Ayesha (She, 1886) et Cléopatre (Cleopatra, 1889) éprouvent de grandes passions et entendent choisir librement l'objet de leur amour, mais l'une comme l'autre sont avant tout reines, et assument les contraintes de leurs charges. Avec Morris, les caractéristiques de la femme libérée, qu'on trouve dans son utopie futuriste (News From Nowhere, 1890) force et courage physiques, aisance dans les rapports avec les hommes, liberté d'aimer, se trouvent incarnées dans son dernier roman, The Well at the World's End (1896), en deux personnages, la Dame d'Abondance et Ursula. La première, pourvue elle aussi d'une longévité inhabituelle et exerçant le pouvoir politique ainsi que le métier des armes aussi bien qu'un homme, rejoint ses consoeurs, Ayesha et Cléopâtre dans une fin tragique pourtant. Serait-ce le signe que les temps n'étaient pas encore mûrs, et que la transgression de l'ordre patriarcal, même chez les socialiste William Morris, ne pouvait aboutir ? Une évolution médiane semble se dessiner, pourtant, en la figure d'Ursula, jeune fille qui combine indépendance, initiative et liberté de choix, tout en respectant les convenances conjugales, à l'instar de nombre de pionnières féministes des débuts du XXe siècle.

Two British authors of the second half of the nineteenth century, Henry Rider Haggard (1856-1925) and William Morris (1834-1896), emplotted versions of the beautiful, semi-immortal and tragic queen in their works of imagination. Though these characters are redolent of the archetypal Femme Fatale, they nonetheless testify to their creators' intention to endow women with unusual might and autonomy. Rider Haggard's Ayesha (She, 1886) and Cleopatra (Cleopatra, 1889) are passionate to the extreme and freely bestow their love and their bodies, but they are also Queens and assume the burdens of their rank. With William Morris, the hallmarks of the free women of his futurist utopia (News From Nowhere, 1890) – physical strength and courage, ease in their behavior with men, freedom to love as they wish – are to be found in two characters of The Well at the World's End (1896), the Lady of Abundance and Ursula. The former, enjoying a magically enhanced lifespan and wielding political power and martial prowess as well as a man, nevertheless perish tragically like her sisters, Ayesha and Cleopatra. Is this to show that times weren't ripe yet, and that subversion of the patriarchal order, even in the works of a socialist such as Morris, was doomed to failure ?  A middle course seems to be suggested in the person of Ursula, who combines, independence, initiative et freedom of choice while observing marital proprieties like many pioneer feminists of the beginning of the twentieth century.

The Arthuriad de Frederick Lees (1996) représente une des tentatives les plus abouties de réécrire la mythologie arthurienne à la lumière de l'histoire de l'Antiquité tardive. J'avais eu l'occasion de démontrer ce en quoi ce roman, qui se veut la fiction ultime dans le domaine en tant qu'il se présente comme les mémoires perdues puis retrouvées dans un oasis égyptien du propre fils d'Arthur, Cadfan, ou Catumandus 1 , était inclusif, conservant de la Matière de Bretagne nombre de ses épisodes, toutes époques confondues, mais les adaptant consciencieusement au monde de la fin du V e siècle 2. The Arthuriad of Catumandus se distingue des autres créations arthuriennes de sa décennie : c'est un roman résolument historique, dont le réalisme diffère de celui des romans de Bernard Cornwell, par exemple, qui admettent une forme de merveilleux et biffent certains personnages traditionnels de la Matière-sous sa forme plus historique-comme Vortigern et Ambrosius. Même si Cornwell, lui aussi, use du procédé des « mémoires » d'un personnage secondaire, Derfel, sans aller jusqu'à faire état d'un manuscrit perdu, une formule inaugurée par John Masefield dans Badon Parchments. La singularité de Lees tient beaucoup à la personne de l'auteur, qui compose son épopée en 1996 et dont la longue carrière fort mouvementée a commencé pendant la Deuxième guerre mondiale où il a été pilote de la RAF. En vue de son unique roman arthurien, il s'est forgé une impeccable culture historique et la dynamique politique de son récit-la dislocation de l'Empire, l'avènement douloureux d'une Bretagne autonome, doit beaucoup à sa propre expérience comme administrateur colonial dans l'Asie de l'après-guerre. Lees participe aussi (en cela son roman est de son temps) à la montée en puissance du thème de la traversée des mers constatée par Howard Wiseman (voir son article dans ce recueil) dans les oeuvres arthuriennes des vingt dernières années. Il tient compte de la thèse riothamienne, développée par Geoffrey Ashe dans The Discovery of King Arthur (1985), mais sous une forme qui lui est personnelle, comme nous allons le voir. Dans son univers il n'y a plus de Romains à secourir en Gaule, à la différence des romans de Helen Hollick (1994-1997). Rome se limite désormais à la lointaine Byzance, dont on attend l'encouragement et les secours, comme chez John Gloag (Artorius Rex, 1977) et John Cowper Powys (Porius, 1951)) d'autant que le narrateur, Cadfan-Catumandus, fils naturel d'Arthur, se trouve être l'envoyé du basileus Anastase. En somme, Lees, qui appartient à la génération des auteurs arthuriens historiens classiques, comme Rosemary Sutcliff, Peter Vansittart, Victor Canning, Catherine Christian, écrit une génération plus tard, quand la nouvelle Matière de Bretagne a été infléchie à la fois dans un sens fantastique (il est ironique de constater que Tolkien, qui a puisé dans la mythologie arthurienne, 3 a en retour teinté le roman arthurien historique de fantastique) et féministe, dans la foulée de Marion Zimmer Bradley, relayée 1

Maximus-Macsen dans la littérature : Prince « du Rêve » ou usurpateur légitimé, les paradoxes d'un personnage How many ambiguities cluster round that man ! (Peter Vansittart) Vous souvenez-vous de Macsen ? Personne ne le connaît, Mille six cents ans, c'est trop loin pour s'en souvenir… Quand Magnus Maximus quitta le pays de Galles En l'an 383, Il nous laissa un vraie nation, Aujourd'hui, regardez-nous, Nous sommes encore là… Yma o hyd, ce chant patriotique gallois de Dafydd Iwan est l'un des rares hymnes nationaux (l'autre serait l'hymne roumain, qui mentionne Trajan) à nommer un empereur romain. Il s'agit pourtant d'un usurpateur ou d'un tyran qui n'a régné que cinq ans, de 383 à 388. Cette étrangeté s'explique aisément quand on sait que Maximus, ou Macsen, est réputé avoir entrepris un transfert d'autorité en Grande-Bretagne au profit d'une tribu bretonne, les Votadini de Cunedda, qu'il aurait épousé une princesse bretonne, Hélène, et qu'il fut incorporé très tôt dans des généalogies galloises. Quelques romans historiques qui occupent une place médiane entre les réécritures arthuriennes et les récits classiques consacrés aux Romains en Grande-Bretagne évoquent ce personnage fascinant qu'est Magnus Maximus. Les imprécisions concernant sa naissance-était-il simple soldat d'origine modeste ou parent du clan théodosien dont nous possédons la généalogie ?-voisinent avec des faits plus précis : ses origines espagnoles, ses capacités militaires, sa politique qui se voulait vertueuse, sa foi nicéenne militante voisinant avec une judéophilie attestée, ses rapports houleux avec Ambroise de Milan sont autant d'éléments qui pourraient intéresser les romanciers. Il y a aussi la référence fascinante à son épouse, dont les chroniqueurs ne révèlent pas le nom, qui aurait participé à des discussions millénaristes au Palais impérial de Trèves avec saint Martin de Tours. Et surtout, il y a son incorporation dans la légendaire galloise qui le distingue de tous les autres usurpateurs analysés dans ce colloque. Venu en sauveur avec Théodose l'Ancien lors de la grande invasion de 367, il serait resté plus de quinze ans en Bretagne (en tant que dux Brittaniarum ?) laissant supposer un enracinement breton pour cet officier supérieur, ou bien, à l'issue d'une carrière qui le conduisit jusqu'en Afrique du Nord, il serait revenu occuper une haute charge quelques années avant son usurpation. Ni sa révolte contre Gratien, ni même le meurtre de ce dernier, ne sont entièrement de son fait ; aussi sa présence en Gaule paraît au départ salvatrice ; usurpateur légitimé, il est reconnu par Théodose durant quatre ans ; finalement il est vaincu et tué quand il se montre trop ambitieux et envahit l'Italie pour

The characters of E.R. Eddison's fantasy novels are not only involved in the wars and political intrigues of the secondary creation, Zimiamvia, but also, in the guise of Lessingham and Mary, have a part to play and  opinions to express in the political upheavals of the early twentieth century. A case can be made that Lessingham, man of action, artist and lover, is not just the denizen of Zimiamvia transported to an imperfect Earth, but is similar to adventurer characters, fictional and otherwise, in novels of John Buchan, a combination of "Winston Churchill, Lawrence of Arabia and Sir Peter Wimsey" as a contemporary journalist described him, and in some respects recalling Gabriele D'Annunzio.

William Morris et la Northernness : Eloge de la Valkyrie-la femme chez William Morris dans The House of the Wolfings et The Roots of the Mountains. Dans l'oeuvre romanesque de William Morris, les représentations féminines préfigurent la femme libre, maîtresse d'elle-même, qu'il souhaite retrouver non dans une rêverie « escapist » autour d'un Moyen-Age imaginaire, mais dans une société juste à venir. Or cet idéal est inséparable de sa vision particulière des sociétés nordiques, antiques et médiévales, qui lui servent d'inspiration tant pour leur richesse légendaire que pour les qualités sociales qu'il pense y trouver. Or ses héroïnes, comparables aux Elfes de Tolkien ou aux fées Morgane ou Mélusine, si elles sont dépeintes avec gourmandise par Morris, qui s'attarde autant sur leur beauté que sur leur force, leur grandeur de caractère, leur générosité et leur charisme, connaissent toutefois l'échec. Dans The Well at the World's End, a Dame d'Abondance trouve la mort, et c'est une jeune fille bien de son monde et de son temps qui la remplace auprès du héros ; la Wood-Sun, dans The House of the Wolfings, se résout à ce que Thiodolf se démette du haubert enchanté et aille à la mort, lui laissant comme seule issue celle de pleurer sur son tumulus funéraire cette mort, certes glorieuse ; leur fille, la Hall Sun, vestale et pythie, est confinée dans son rôle solitaire au service de la communauté et ne se mariera jamais. Le monde de Morris, tout aussi enchanté à l'origine que celui de Tolkien, se veut historique et va dans le sens de l'effacement de ses aspects proprement magiques vers une société qui elle aussi gagne en complications, en complexité, et donc en injustice et en désordre potentiel, même si, à l'issue des Roots of the Mountains, on s'attarde sur une période de grâce. On a vite compris que Sun-beam, rencontrée dans cette forêt qui paraît encore enchantée, n'a rien d'une fée comme l'était la Wood-Sun, et elle assume, comme Ursula dans The Well at the World's End et comme la Bride, une fois guérie de ses blessures, le rôle d'une parfaite épouse, nullement victorienne, nullement soumise, capable de se hisser à l'occasion à la stature d'un homme et même d'un guerrier si les circonstances l'exigent, telle que Morris se plaisait à l'imaginer dans un monde plus juste. En temps de paix elles seront avant tout épouses et mères. 1 Aussi, dans le cadre de cette réflexion sur la Northernness il nous a semblé intéressant de nous concentrer sur ses « Germanic Romances » que sont The House of the Wolfings (1888) et The Roots of the Mountains (1889). On y déchiffrera l'image de la femme, laquelle connaît une intéressante évolution d'un roman à l'autre, correspondant au passage d'un monde historique mais magique à un monde historique mais où la magie perdure comme un souvenir. Marque de nordicité s'il en fût, dans The House, l'héroïne n'est autre qu'une Valkyrie, sans que le nom ne soit jamais cité, tout au plus la périphrase « Chooser of the Slain », tandis que dans The Roots celle qui en a toutes les apparences n'est in fine qu'une mortelle, même si elle est héroïque et s'entoure d'une aura qui laisse supposer au premier abord une nature divine. Ces deux romans occupent en tout cas une place émérite et charnière dans l'oeuvre de Morris-The Roots aurait été son roman préféré. Si Morris est bel et bien l'un des précurseurs de la Fantasy, reconnu comme tel par deux des créateurs les plus célèbres, 1 La 'Sun-beam' entend se différencier explicitement d'un personnage tel la Wood-sun dans The House of the Wolfings : « I would not have thee think of me as a Chooser of the Slain, a warrior maiden, or as of one who hath no joy save in the battle whereto she biddeth others... »(William Morris,

Les passions dans Clarissa

    Dans le roman de Richardson, Clarissa, personnage central, génère les passions de Lovelace, des Harlowe et les siennes. Lovelace, le libertin démoniaque, jette son dévolu sur la belle Clarissa et enflamme les passions de sa famille contre lui et contre leur fille.  En retour, son duel avec James et la haine de la famille l’incitent à la vengeance.  A partir de cet incident, les intérêts des différents protagonistes se précisent et les circonstances qui les confrontent, confortent les positions de chacun et développent des passions qui les poussent aux extrêmes.  L’ambition sociale de James, l’orgueil de sa famille se heurtent à la résistance de Clarissa qui affronte ses parents dans une lutte inégale des volontés.  Les deux clans homme/femme entrent dans un conflit dont la femme est la victime.  D’un côté, le père Harlowe et son fils s’appuient sur leur orgueil  et sur le devoir d’obéissance.  La haine, l’ambition et le pouvoir les dominent et leurs passions se renforcent, tandis que de l’autre on assiste à des passions contradictoires chez la mère, Clarissa et Lovelace.  La plus forte des passions, issue de l’instinct sexuel, commande la machine Lovelace.  Fidèle à sa conception chrétienne de la vie, Richardson démontre que la passion conduit au péché et le péché à la mort.  La mort, qui surprend brutalement les personnages du roman, est le prix à payer par Clarissa pour ses fautes mais elle a su s’y préparer en évacuant ses mauvaises passions.