edited volumes by odile gannier

Robert Louis Stevenson spent the last six and a half years of his life in the Pacific (1888-1894)... more Robert Louis Stevenson spent the last six and a half years of his life in the Pacific (1888-1894). He was a keen participant observer of the islands – from his first Pacific landfall in the Marquesas to his last residency in Samoa, where he lies buried. Against the prevailing fatal impact argument of the time, he encouraged and celebrated the resilience of Polynesian culture. Such works as In the South Seas, South Sea Tales, A Footnote to History, the Times articles, his Pacific legends, fables and poems, testify to Stevenson’s commitment to Pacific culture. In their turn, Pacific writers have written or commented upon Scottish Stevenson’s place in their own culture.
For this Loxias issue on “Stevenson and Polynesian Culture”, all unpublished essays on Stevenson in the following areas are welcome: Pacific travel literature, Pacific fiction, comparative literature, colonial/post-colonial literature, Pacific anthropology/proto-ethnography, Pacific history, visual arts, cross-cultural exchanges, languages, etc.
Edited Books by odile gannier
Papers by odile gannier

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2013
Un homme qui ne sait ni voyager ni tenir un journal a composé ce journal de voyage. Mais, au mome... more Un homme qui ne sait ni voyager ni tenir un journal a composé ce journal de voyage. Mais, au moment de signer, tout à coup pris de peur, il se jette la première pierre. Voilà. L'AUTEUR. 1928 1 L'attrait du récit de voyage en lui-même dépend largement des talents d'écriture du diariste (écrivain de métier ou d'occasion), mais aussi des qualités personnelles du voyageur. Aussi une ambiguïté certaine règne-t-elle dans les quelques lignes qui tiennent lieu de préface à Ecuador, sous-titré Journal de voyage. Un écrivain déjà reconnu prend en général la plume avec assurance, convaincu que le récit de ses propres aventures trouvera une forme propre à entretenir l'intérêt de ses lecteurs. Cependant il peut afficher le souci d'une réputation à entretenir. L'écrivain d'occasion, lui, prend le double risque de se mettre en scène et d'endosser, peut-être en l'usurpant, l'habit de l'écrivain de métier. Dans les deux cas se justifie l'emploi du chleuasme, figure de style consistant à pratiquer l'auto-dépréciation dans l'espoir d'une réfutation implicite de l'interlocuteur, voire des éloges plus appuyés lorsque l'interlocuteur est en mesure de le faire. « Je suis totalement ignorant dans ce domaine, mais… », affirme celui qui s'apprête, après une dénégation liminaire, à développer des propositions qu'il aimerait faire considérer comme éclairées. Ce procédé est donc plus fréquemment employé dans le discours ou dans toute situation où l'interlocuteur va, sur un ton modestesouvent hypocritese récrier pour réconforter l'auditeur. Cette façon de se déprécier soi-même le tout premier, souvent ironique, opère à titre préventif pour désamorcer toute critique. Dans la fiction, cette auto-dépréciation, aussi appelée auto-catégorème, paraît ne pouvoir être le fait que du narrateur ou de l'auteur ; en l'occurrence, le récit de voyage est l'un des lieux où a durablement régné l'usage pour le voyageur, par modestie, réelle ou feinte, de minimiser ses qualités d'écrivain. On en trouve des exemples dans les écrits des découvreurs dès le XVI e siècle ou même avant, mais nous nous concentrerons sur la période, essentiellement française, allant du XIX e siècle à nos jours.[232] Bien entendu cette figure n'est pas une dévalorisation gratuite du texte. L'économie de la lecture ne peut s'accommoder d'une dépréciation sans compensation ; quelques bénéficesoutre la bienveillance du lecteursont attendus de cette modestie initiale : véridicité, facilité de lecture, ou reconnaissance de la relation dans le genre de la littérature de voyage, malgré l'inexpérience ou l'obscurité de son auteur. Le souci d'une expression littérairement acceptable fait souvent l'objet de précautions liminaires ; parfois le manque d'intérêt du voyage ou la monotonie du paysage ; exceptionnellement les capacités d'observation, l'exactitude ou la sincérité. Bref, pour pasticher La Rochefoucauld, tout le monde se plaint de son voyage, et personne ne se plaint de son jugement. Quelles sont les compensations,

Servitude et grandeur militaires ne semble plus être particulièrement en vogue, ne serait-ce d'ab... more Servitude et grandeur militaires ne semble plus être particulièrement en vogue, ne serait-ce d'abord, peut-être, que parce que son titre n'incite pas à le considérer comme une oeuvre romanesque, et encore moins comme une oeuvre divertissante. De fait, le texte est hybride, mêlant une réflexion assez désabusée sur la destinée militaire en dépit des valeurs qu'elle prône-honneur, fidélité, courage, constance…et trois récits essentiels sous forme de nouvelles (comme l'explique l'histoire de sa composition), elles-mêmes conçues de manière mixte, le narrateur mémorialiste donnant à son tour la parole à des personnages narrateurs secondaires, qui peuvent à l'occasion faire s'exprimer une autre voix. Ce faisant, il est au carrefour de plusieurs sous-genres, mémoires (ou mémoires fictifs), essais, roman historique, roman maritime. Cette construction enchâssée des récits est en effet une forme narrative très souvent rencontrée dans le roman maritime et déjà empruntée, dans les mêmes années, par Walter Scott, Fenimore Cooper ou le capitaine Marryat, et, en France, par Eugène Sue (en particulier La Salamandre, 1832) ou E. Corbière. L'oeuvre est loin d'être inintéressante par la teneur même de ses récits, qui mettent l'accent sur la solitude du capitaine devant ses responsabilités, le simple courage silencieux, le sens du devoir et de l'honneur qui s'imposent parfois tragiquement à lui, en dépit de ses inclinations ainsi que l'image d'une certaine justice immanente qui contrebalance le remords. Vigny évoque aussi la résistance de l'homme face aux éléments, comme dans le poème « La frégate la Sérieuse », ou à tout ce qui le dépasse et à quoi il doit se soumettre sans murmurer.

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2005
La culture serait-elle une notion exclusivement moderne ? N'est-il pas anachronique de parler de ... more La culture serait-elle une notion exclusivement moderne ? N'est-il pas anachronique de parler de culture à la Renaissance, et qui plus est, chez des voyageurs issus de toutes les origines ? Ce concept implique sans doute que les protagonistes en soient conscients, et théorisent sur le sujet en établissant clairement le terme, ce qui ne semble avoir été le cas. Or on peut envisager la culture de deux manières différentes : l'une serait un savoir abstrait succédant à un apprentissage, et pourrait alors s'assimiler, à quelque degré que ce soit, à l'érudition ; l'autre engloberait des notions et des pratiques spécifiques à un groupe, ce qui l'apparenterait à la « civilisation ». La première acception paraît la plus évidente à la Renaissance 1 , époque de bouillonnement intellectuel, de redécouverte de pans entiers du savoir détenus par les Anciens et oubliés ensuite. Mais le bon sens veut, après Montaigne, que chacun appelle barbarie ce qui n'est pas de son usage ; comme de vrai, il semble que nous n'avons autre mire de la vérité et de la raison que l'exemple et idée des opinions et usances du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes choses 2 .

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2021
« Droit privé et sciences criminelles », p. 167-180. NB : Cette version d'auteur comporte une bib... more « Droit privé et sciences criminelles », p. 167-180. NB : Cette version d'auteur comporte une bibliographie qui ne figure pas dans la version publiée. ⟨hal-03558956⟩ Résumé « Y at -il trop de romans sur les migrants ? » titrait le magazine Le Point du 18 décembre 2019 (dans un article signé Valérie Marin La Meslée). Le titre lui-même de cet article surprend au regard du contenu, qui valorise au contraire les récentes publications fictionnelles sur le sujet. Mais il soulève la question de la reconnaissance d'une production littéraire : dirait-on « y at -il trop de romans policiers ? » ou « publie-ton trop de romans d'amour ? » ? C'est dire, en réalité, la force de l'image ou de la fiction pour évoquer un sujet politique ou social, son impact autrement plus durable que des colonnes de chiffres ou de la publication de quotas. Sans doute, l'immédiateté de l'émotion et l'éveil de la puissance de l'imagination sont-ils plus percutants dans un roman que dans un article de journal ou de loi. Nous tirerons nos exemples de récents romans à succès « grand public », dont Eldorado de Laurent Gaudé (2006), Fabio Geda, Nel mare ci sono i coccodrilli (2010) ou encore Mur Méditerranée de Louis-Philippe Dalembert (finaliste Goncourt 2019).
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Sep 1, 2019

L'effet de fiction (2001)
sa vie et ses aventures : comment, destiné par ses parents au séminaire, il s'engage sur un vaiss... more sa vie et ses aventures : comment, destiné par ses parents au séminaire, il s'engage sur un vaisseau quittant Saint-Malo pour les Antilles, pour devenir ensuite boucanier, simple flibustier, puis capitaine. Le récit, haut en couleurs, plein de péripéties, oscille constamment entre héroïsation et auto-parodie. Le manuscrit est présenté dans l'édition de 1952 comme tout récemment découvert, et préfacé par Albert T'Serstevens, auteur, entre autres, de romans d'aventures comme les Corsaires du Roi... On y lit que les Cahiers auraient été découverts dans une vieille malle placée à l'intérieur du « caveau muré » d'une maison démolie, à Saint-Malo, par un bombardement en 1944. D'après la préface, le manuscrit découvert par hasard est de la main d'un contemporain de Louis XIV, né peut-être vers 1640, passé aux Îles vers 1660 et mort « sans doute à Saint-Malo, et peut-être dans la légendaire maison de Duguay-Trouin » aux environs de 1710. « Il s'agissait évidemment de mémoires authentiques ». Cette affirmation et cette miraculeuse découverte, qui nous rappelle d'autres mises en scène, peut-elle, aujourd'hui, persuader le lecteur de l'authenticité du texte? Sans d'ailleurs nous attacher à la découverte de la vérité historique, nous nous demanderons comment la préface, comme le texte, peuvent nous fournir des éléments de réponses contradictoires. L'accumulation de détails qui « font vrai » ne serait-elle pas précisément le signe de la fiction ? Ce texte est une version remaniée de la 1 ère publication dans le colloque en ligne L'effet de fiction, groupe de recherche Fabula, mars 2001, http://www.fabula.org/effet/interventions/10.php. À la date de la première publication de cet article, en effet, le texte passait encore pour authentique et la maison Grasset avait confirmé ce statut. Depuis (et en particulier l'exposition du Musée de la marine du « manuscrit », en 2002, qui a prouvé qu'il s'agissait matériellement d'un faux), l'idée du canular littéraire est privilégiée, avec la collaboration probable de deux complices : Gustave Alaux (1887-1965), qui s'est surtout fait connaître comme peintre et illustrateur, Albert t'Serstevens (1885-1974) comme écrivain. Il reste que l'enquête est encore possible du simple point de vue littéraire. « Toute approche des pirates s'apparentera moins à la lecture d'un manuscrit qu'à celle d'un palimpseste », affirme Gilles Lapouge dans Les Pirates. Le déchiffrement de leurs tribulations doit s'opérer sur deux portées : au-dessous du texte où les archives ont consigné le procès-verbal de leurs vilenies, il est un autre texte disparu et c'est là que s'étalait le chiffre de l'énigme. […] Si la terre a beaucoup glosé sur leurs exploits, les pirates ont fort peu ou fort mal parlé. Leur course se développe dans un formidable silence. Elle se défait à mesure qu'elle se fait et sa mémoire est déplorable. La nature du flibustier n'est pas bavarde, son discours est un discours en creux, une absence de discours, le dialogue de plusieurs mutismes 1. Il semble qu'il y ait précisément de notoires exceptions à cette règle. Les voyageurs aiment naturellement à parler de ce qui leur est arrivé, surtout lorsqu'ils sont hors de danger, et qu'ils croient que leurs aventures méritent d'être sues. Je ne veux donc point dissimuler que je prends quelque plaisir à raconter ce qui s'est passé pendant mon voyage. Peutêtre même ne sera-ton pas fâché de l'apprendre ; je tâcherai du moins d'en rendre la relation aussi agréable qu'elle est vraie 2. Ainsi commencent les Mémoires d'Alexandre OExmelin, chirurgien de la flibuste de 1666 à 1672 : l'Histoire des Aventuriers qui se sont signalés dans les Indes parut en 1678 et connut un succès immédiat. Sa galerie de portraits, boucaniers, capitaines de la flibuste, gueux de mer et forbans de tout poil, constitue aujourd'hui une source indiscutée sur les Caraïbes de la fin du XVII e siècle. Indiscutée ? Sauf dans les célèbres Cahiers de Louis-Adhémar-Timothée Le Golif, dit Borgnefesse, capitaine de la flibuste 3 , où ce bouillant personnage raconte ses souvenirs, retrouvés en 1944 « publiés par Gustave Alaux, présentés par A. t'Serstevens » en 1952. Le Golif est supposé être né vers 1640, passé aux Îles vers 1660, et de retour « le 4 octobre de l'an 1685 ». Il se serait alors mis à écrire ses mémoires, vers 1705-1710. Le texte est interrompu par la disparition des dernières pages, sans mention de la mort de Louis XIV, soit avant 1715. Il situe le début de ses aventures en 1666. Ce n'est que quelques années plus tard que le flamand OExmelin vint aux Îles. Étant retourné ensuite chez lui, il y a écrit l'Histoire des Aventuriers de l'Amérique, ouvrage qui fut mis en français par le Sieur de Fontignères. Quoique n'écrivant que de ouï-dire et se faisant l'écho de maintes bourdes et balivernes que j'ai relevées en son livre, il a conté, mieux que je ne pourrais faire, les exploits de plusieurs vaillants et renommés Capitaines que j'ai, ce pourtant, moi, mieux connus que lui et de plus près, mais il en a passé des meilleurs, tels que Julien, Fulbert, Cameyrelongue, Vincent, et quelques autres, sans oublier votre serviteur 4. (24)

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2019
Les publications du site REVEL sont protégées par les dispositions générales du Code de la propri... more Les publications du site REVEL sont protégées par les dispositions générales du Code de la propriété intellectuelle. Conditions d'utilisation-respect du droit d'auteur et de la propriété intellectuelle L'accès aux références bibliographiques et au texte intégral, aux outils de recherche ou au feuilletage de l'ensemble des revues est libre, cependant article, recension et autre contribution sont couvertes par le droit d'auteur et sont la propriété de leurs auteurs. Les utilisateurs doivent toujours associer à toute unité documentaire les éléments bibliographiques permettant de l'identifier correctement et notamment toujours faire mention du nom de l'auteur, du titre de l'article, de la revue et du site Revel. Ces mentions apparaissent sur la page de garde des documents sauvegardés sur les postes des utilisateurs ou imprimés par leur soin. L'université de Nice-Sophia Antipolis est l'éditeur du portail REVEL@Nice et à ce titre détient la propriété intellectuelle et les droits d'exploitation du site. L'exploitation du site à des fins commerciales ou publicitaires est interdite ainsi que toute diffusion massive du contenu ou modification des données sans l'accord des auteurs et de l'équipe Revel.
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Oct 1, 2019
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Dec 16, 2022

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Dec 15, 2017
J'examinai la carte. […] Je devais l'y rejoindre dans les derniers jours de juillet avec le bagag... more J'examinai la carte. […] Je devais l'y rejoindre dans les derniers jours de juillet avec le bagage et la vieille Fiat que nous avions retapée, pour continuer vers la Turquie, l'Iran, l'Inde, plus loin peut-être… 4 C'est grâce à elle-avec elle-, que le bourlingueur a pu aller de Genève à Ceylan, où il l'a finalement vendue. Il en est question à plusieurs reprises dans la correspondance entre Thierry Vernet et Nicolas Bouvier 5 ; et plusieurs photos montrent les deux amis et leur voiture en voyage. Il avait bénéficié de ce petit véhicule dès 1949 : en effet, victime, à l'armée, d'une grave blessure au genou, il s'était retrouvé momentanément handicapé. La voiture devient alors une heureuse prothèse qui accroît ses possibilités naturelles. Le bon côté de cette longue infortune a été que j'ai reçu une petite voiture, la Fiat Topolino avec laquelle j'ai plus tard voyagé, pour que je puisse me rendre à l'Université. À l'époque, très peu d'étudiants possédaient une voiture. C'était un luxe sans commune mesure avec le train de vie de mes parents 6. Cette Topolino 7-la « petite souris » italienne-leur vaudra de pouvoir faire toute la route par leurs propres moyens, entre la Suisse et l'Inde, ainsi que le raconte L'Usage du monde. Certes elle imposait le dénuement par son exiguïté, et la patience par ses performances limitées-conçue pour ne pas dépasser 70 km à l'heure, elle était poussive dans les montées, et tombait fort souvent en panne. Mais elle avait le mérite d'exister. Mieux, cette flâneuse leur permettait paradoxalement le luxe conjugué de l'aventure et de la lenteur. Certes, ils n'étaient pas non plus les premiers à tenter l'aventure et partir en voiture en Afghanistan, et à avoir pour but ultime le Khyber Pass. Ils avaient été précédés en particulier par deux femmes, suisses elles aussi : en 1939-l'année où Saint-Exupéry publiait Terre des hommes-, Ella Maillart et Annemarie Schwarzenbach , alias « Christina » dans le récit La Voie cruelle, étaient parties au volant d'une Ford Roadster « Deluxe », quittant l'Europe au bord de la guerre. Selon Maillart, Christina avait probablement ajouté : « la pauvre voiture approche de sa fin et mon père m'a promis une Ford » ; je n'entendis que ce dernier nom. Il semble avoir été responsable de tout. Un mot a suffi pour que s'ordonnent des idées éparses, pour que de vagues tendances se cristallisent en un plan bien établi. Comme un écho venant de loin j'entendis une voix ressemblant à la mienne dire :

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2009
ÉTRANGER.-Engouement pour tout ce qui vient de l'étranger, preuve de l'esprit libéral. Dénigremen... more ÉTRANGER.-Engouement pour tout ce qui vient de l'étranger, preuve de l'esprit libéral. Dénigrement de tout ce qui n'est pas français, preuve de patriotisme 2. Ce que souligne Flaubert dans le Dictionnaire des idées reçues transparaissait déjà dans le rapport des Grecs à leurs voisins ou au reste de l'humanité, et relève depuis du lieu commun. En effet nulle société n'est hermétiquement close sur elle-même à long terme : mais le rapport à l'étranger peut se décliner de multiples manières. Parfois, au regard d'un groupe constitué, l'étranger est envisagé de très loin : on en connaît éventuellement l'existence mais les contacts ne viennent pas de cet ailleurs : des populations qui existent sans le moindre rapport entre elles ne se « pensent » pas nécessairement, comme l'affirmait Georg Simmel : Die Bewohner des Sirius sind uns nicht eigentlich fremddies wenigstens nicht in dem soziologisch in Betracht kommenden Sinne des Wortes-, sondern sie existieren überhaupt nicht für uns. Les habitants de Sirius ne nous sont pas véritablement « étrangers »au moins pas dans le sens sociologique du terme qui nous occupe ici-, mais ils n'ont aucune espèce d'existence pour nous 3. Dans ce cas, selon le degré de « tension » entre les deux états de culture et le sentiment que l'on entretient à cet égard, on peut éprouver pour l'étranger une indifférence absolue, de la curiosité ou du mépris ; ainsi, si l'on excepte l'ignorance complète, qui s'accompagne volontiers des représentations les plus farfelues, peuvent se dessiner les impressions d'exotisme ou l'accusation de barbarie. Si au contraire c'est l'étranger qui arrive, en visiteur, la situation est encore différente : le voyageur de passage n'a pas le même impact sur une cité que l'étranger qui vient s'y installer. Dès lors, celui-ci entretient avec les habitants et leurs façons de vivre et de concevoir la vie sociale des rapports complexes. C'est dans ce type de configuration que se place, semble-t-il, le hotu painu en Polynésie. Dans sa Soziologie 4 , parue en 1908, Georg Simmel consacre un chapitre à l'étude de l'espace dans la construction des rapports sociaux ; il y insère une sorte d'encart, Exkurs über den Fremdengénéralement traduit par Digression sur l'étranger-, souvent présenté comme un essai en soi, ce qui, peut-être, fausse un peu sa portée. Le sociologue y examine particulièrement le statut de l'étranger comme visiteur : Er ist hier also der Fremde nicht in dem bisher vielfach berührten Sinn gemeint, als der Wandernde, der heute kommt und morgen geht, sondern als der, der heute kommt und morgen bleibtsozusagen der potenziell Wandernde, der, obgleich er nicht weitergezogen ist, die Gelöstheit des Kommens und Gehens nicht ganz überwunden hat. Nous ne parlons donc pas ici de l'étranger dans le sens souvent évoqué jusque là, le passant qui arrive aujourd'hui et part demain, mais celui qui arrive aujourd'hui et reste demain, en quelque sorte le « passant en puissance » qui, bien que n'ayant pas continué son chemin, n'a pas complètement renoncé à la liberté d'aller et venir 5. En fait, quels que soient les liens qui relient l'étranger et la société où il réside, Simmel refusait de se replier sur les bases de l'exclusion, de la séparation, du mépris ou du rejet. À défaut d'autres rapprochements, restera la communauté de la simple humanité. 40 G. Simmel, ibid., p. 689.

sa vie et ses aventures : comment, destiné par ses parents au séminaire, il s'engage sur un vaiss... more sa vie et ses aventures : comment, destiné par ses parents au séminaire, il s'engage sur un vaisseau quittant Saint-Malo pour les Antilles, pour devenir ensuite boucanier, simple flibustier, puis capitaine. Le récit, haut en couleurs, plein de péripéties, oscille constamment entre héroïsation et auto-parodie. Le manuscrit est présenté dans l'édition de 1952 comme tout récemment découvert, et préfacé par Albert T'Serstevens, auteur, entre autres, de romans d'aventures comme les Corsaires du Roi... On y lit que les Cahiers auraient été découverts dans une vieille malle placée à l'intérieur du « caveau muré » d'une maison démolie, à Saint-Malo, par un bombardement en 1944. D'après la préface, le manuscrit découvert par hasard est de la main d'un contemporain de Louis XIV, né peut-être vers 1640, passé aux Îles vers 1660 et mort « sans doute à Saint-Malo, et peut-être dans la légendaire maison de Duguay-Trouin » aux environs de 1710. « Il s'agissait évidemment de mémoires authentiques ». Cette affirmation et cette miraculeuse découverte, qui nous rappelle d'autres mises en scène, peut-elle, aujourd'hui, persuader le lecteur de l'authenticité du texte? Sans d'ailleurs nous attacher à la découverte de la vérité historique, nous nous demanderons comment la préface, comme le texte, peuvent nous fournir des éléments de réponses contradictoires. L'accumulation de détails qui « font vrai » ne serait-elle pas précisément le signe de la fiction ? Ce texte est une version remaniée de la 1 ère publication dans le colloque en ligne L'effet de fiction, groupe de recherche Fabula, mars 2001, http://www.fabula.org/effet/interventions/10.php. À la date de la première publication de cet article, en effet, le texte passait encore pour authentique et la maison Grasset avait confirmé ce statut. Depuis (et en particulier l'exposition du Musée de la marine du « manuscrit », en 2002, qui a prouvé qu'il s'agissait matériellement d'un faux), l'idée du canular littéraire est privilégiée, avec la collaboration probable de deux complices : Gustave Alaux (1887-1965), qui s'est surtout fait connaître comme peintre et illustrateur, Albert t'Serstevens (1885-1974) comme écrivain. Il reste que l'enquête est encore possible du simple point de vue littéraire. « Toute approche des pirates s'apparentera moins à la lecture d'un manuscrit qu'à celle d'un palimpseste », affirme Gilles Lapouge dans Les Pirates. Le déchiffrement de leurs tribulations doit s'opérer sur deux portées : au-dessous du texte où les archives ont consigné le procès-verbal de leurs vilenies, il est un autre texte disparu et c'est là que s'étalait le chiffre de l'énigme. […] Si la terre a beaucoup glosé sur leurs exploits, les pirates ont fort peu ou fort mal parlé. Leur course se développe dans un formidable silence. Elle se défait à mesure qu'elle se fait et sa mémoire est déplorable. La nature du flibustier n'est pas bavarde, son discours est un discours en creux, une absence de discours, le dialogue de plusieurs mutismes 1. Il semble qu'il y ait précisément de notoires exceptions à cette règle. Les voyageurs aiment naturellement à parler de ce qui leur est arrivé, surtout lorsqu'ils sont hors de danger, et qu'ils croient que leurs aventures méritent d'être sues. Je ne veux donc point dissimuler que je prends quelque plaisir à raconter ce qui s'est passé pendant mon voyage. Peutêtre même ne sera-ton pas fâché de l'apprendre ; je tâcherai du moins d'en rendre la relation aussi agréable qu'elle est vraie 2. Ainsi commencent les Mémoires d'Alexandre OExmelin, chirurgien de la flibuste de 1666 à 1672 : l'Histoire des Aventuriers qui se sont signalés dans les Indes parut en 1678 et connut un succès immédiat. Sa galerie de portraits, boucaniers, capitaines de la flibuste, gueux de mer et forbans de tout poil, constitue aujourd'hui une source indiscutée sur les Caraïbes de la fin du XVII e siècle. Indiscutée ? Sauf dans les célèbres Cahiers de Louis-Adhémar-Timothée Le Golif, dit Borgnefesse, capitaine de la flibuste 3 , où ce bouillant personnage raconte ses souvenirs, retrouvés en 1944 « publiés par Gustave Alaux, présentés par A. t'Serstevens » en 1952. Le Golif est supposé être né vers 1640, passé aux Îles vers 1660, et de retour « le 4 octobre de l'an 1685 ». Il se serait alors mis à écrire ses mémoires, vers 1705-1710. Le texte est interrompu par la disparition des dernières pages, sans mention de la mort de Louis XIV, soit avant 1715. Il situe le début de ses aventures en 1666. Ce n'est que quelques années plus tard que le flamand OExmelin vint aux Îles. Étant retourné ensuite chez lui, il y a écrit l'Histoire des Aventuriers de l'Amérique, ouvrage qui fut mis en français par le Sieur de Fontignères. Quoique n'écrivant que de ouï-dire et se faisant l'écho de maintes bourdes et balivernes que j'ai relevées en son livre, il a conté, mieux que je ne pourrais faire, les exploits de plusieurs vaillants et renommés Capitaines que j'ai, ce pourtant, moi, mieux connus que lui et de plus près, mais il en a passé des meilleurs, tels que Julien, Fulbert, Cameyrelongue, Vincent, et quelques autres, sans oublier votre serviteur 4. (24)
Acta Fabula, May 23, 2011
Cet article est un compte-rendu du livre : Vincent Debaene, L’Adieu au voyage. L’ethnologie franç... more Cet article est un compte-rendu du livre : Vincent Debaene, L’Adieu au voyage. L’ethnologie française entre science et littérature, Paris : Éditions Gallimard, coll. « Bibliothèque des sciences humaines », 2010, 521 p., EAN 9782070781119.

HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), 2013
Un homme qui ne sait ni voyager ni tenir un journal a composé ce journal de voyage. Mais, au mome... more Un homme qui ne sait ni voyager ni tenir un journal a composé ce journal de voyage. Mais, au moment de signer, tout à coup pris de peur, il se jette la première pierre. Voilà. L'AUTEUR. 1928 1 L'attrait du récit de voyage en lui-même dépend largement des talents d'écriture du diariste (écrivain de métier ou d'occasion), mais aussi des qualités personnelles du voyageur. Aussi une ambiguïté certaine règne-t-elle dans les quelques lignes qui tiennent lieu de préface à Ecuador, sous-titré Journal de voyage. Un écrivain déjà reconnu prend en général la plume avec assurance, convaincu que le récit de ses propres aventures trouvera une forme propre à entretenir l'intérêt de ses lecteurs. Cependant il peut afficher le souci d'une réputation à entretenir. L'écrivain d'occasion, lui, prend le double risque de se mettre en scène et d'endosser, peut-être en l'usurpant, l'habit de l'écrivain de métier. Dans les deux cas se justifie l'emploi du chleuasme, figure de style consistant à pratiquer l'auto-dépréciation dans l'espoir d'une réfutation implicite de l'interlocuteur, voire des éloges plus appuyés lorsque l'interlocuteur est en mesure de le faire. « Je suis totalement ignorant dans ce domaine, mais… », affirme celui qui s'apprête, après une dénégation liminaire, à développer des propositions qu'il aimerait faire considérer comme éclairées. Ce procédé est donc plus fréquemment employé dans le discours ou dans toute situation où l'interlocuteur va, sur un ton modestesouvent hypocritese récrier pour réconforter l'auditeur. Cette façon de se déprécier soi-même le tout premier, souvent ironique, opère à titre préventif pour désamorcer toute critique. Dans la fiction, cette auto-dépréciation, aussi appelée auto-catégorème, paraît ne pouvoir être le fait que du narrateur ou de l'auteur ; en l'occurrence, le récit de voyage est l'un des lieux où a durablement régné l'usage pour le voyageur, par modestie, réelle ou feinte, de minimiser ses qualités d'écrivain. On en trouve des exemples dans les écrits des découvreurs dès le XVI e siècle ou même avant, mais nous nous concentrerons sur la période, essentiellement française, allant du XIX e siècle à nos jours.[232] Bien entendu cette figure n'est pas une dévalorisation gratuite du texte. L'économie de la lecture ne peut s'accommoder d'une dépréciation sans compensation ; quelques bénéficesoutre la bienveillance du lecteursont attendus de cette modestie initiale : véridicité, facilité de lecture, ou reconnaissance de la relation dans le genre de la littérature de voyage, malgré l'inexpérience ou l'obscurité de son auteur. Le souci d'une expression littérairement acceptable fait souvent l'objet de précautions liminaires ; parfois le manque d'intérêt du voyage ou la monotonie du paysage ; exceptionnellement les capacités d'observation, l'exactitude ou la sincérité. Bref, pour pasticher La Rochefoucauld, tout le monde se plaint de son voyage, et personne ne se plaint de son jugement. Quelles sont les compensations,
HAL (Le Centre pour la Communication Scientifique Directe), Oct 6, 2019
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For this Loxias issue on “Stevenson and Polynesian Culture”, all unpublished essays on Stevenson in the following areas are welcome: Pacific travel literature, Pacific fiction, comparative literature, colonial/post-colonial literature, Pacific anthropology/proto-ethnography, Pacific history, visual arts, cross-cultural exchanges, languages, etc.
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